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Le blog de Bernard Collot
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8 septembre 2013

Une rentrée étrange

Etrange rentrée (billet invité)

Rentrée. C’est toujours une plongée, même si c’est la nième. Elle peut être enthousiaste, angoissante, à reculons… pour les enfants, pour les enseignants, pour les parents. C’est bien une plongée puisqu’il faut passer de l’univers normal de la liberté, de l’activité naturelle, des interrelations sociales amicales, à celui de la piscine froide et artificielle de l’école (ou de l’usine, ou du bureau…) sous la contrainte de ses maîtres-nageurs ou en étant soi-même maître-nageur. Certains la racontent. Ci-dessous, une rentrée étrange. BC

 

Pour moi, rentrée étrange...en tant que titulaire remplaçante. Pas de remplacement pour le moment. Je suis dans mon école de rattachement et partage mon temps entre :

- faire des photocopies pour les collègues,

- remplir des tâches administratives de direction (quelle ironie, j'ai expliqué à la directrice (qui est très gentille et à l'écoute) que je refusais de l'aider à remplir Base-élèves !,

- faire de petits travaux pour les collègues

- et enfin et surtout, des lectures (pas besoin de vous signaler quel genre...)

...Des lectures dans la salle des maitres dans laquelle je peux entendre ce qui se passe dans les classes... en décalage complet avec mes lectures ! Ce qui me donne envie de courir, courir vite et m'enfuir... et je me dis que les élèves doivent avoir envie aussi...de s'enfuir...

Classe en randognon, murs, couloirs sobres, sans vie, odeur nauséabonde dans les WC, pas de place pour la fantaisie, pas de lâcher prise, discours dans la norme,... je me sens triste.

C'est midi. Repas… coopératif... euh !... individuel... mais en groupe... Discussions d'instit... « Ah ! Peut-être que celui-là va enfin se décider à entrer dans le système ! », « Tu penses qu'on va bientôt avoir la prime de 400 euros ? »

Je me sens seule, très seule... J'essaie de placer deux, trois phrases... comme ça... pour voir... Evidemment, mes remarques restent en suspend et personne ne relève.

Je vois, j'entends tellement de choses qui me font dire : « mais c'est tellement évident que ça ne marche pas !! » J'ai l'impression qu'à chaque remarque, j'ai un argument. Mais je me garde de trop parler... je ne saurais pas le faire sans donner l'impression que j'ai la science infuse, ça pourrait être mal pris et je ne voudrais pas les juger... J'ai juste envie de partager le bonheur que l'on peut avoir d'être en classe. Je ne sais pas encore comment m'y prendre pour parler aux collègues... l'instit est tellement sur la défensive !

J'ai pensé très fort à Philippe quand il disait dans une discussion lors du séjour « congrès-vacances » : « Qu'est-ce que je ferais si ma classe unique fermée? Je ne me verrais pas du tout dans une grosse structure ? »...(bon, ses propos ne sont sans doute pas exactement cela, mais l'idée y est). Et bien je me suis faite la même réflexion... « Qu'est-ce que je ferais si je me retrouvais dans une grosse équipe ? »

Sauf que pour moi, cette réflexion est en référence aux collègues. Parce que, lors de ce début d'année, j'ai pris conscience à quel point j'étais en dehors du cadre et je ne sais pas si je pourrais côtoyer quotidiennement ceux qui sont dans le cadre.

Je pense bien à vous, faites-vous plaisir dans vos classes.

L.H.

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Commentaires
P
... merci beaucoup !
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P
Oui, c'est étrange et je me retrouve dans ce que tu dis ... En même temps, je me dis que certaines de nos réflexions peuvent paraitre tout autant étranges auprès de personnes plus avancées en Freinet, 3 type ... Par exemple, c'est assez récent pour moi de faire le distinguo entre enfant et élève. Ou plutôt, c'est assez récent pour moi de parler (et considérer) des gamins qu'on me confie comme des enfants et pas seulement comme des élèves. Auparavant, je n'avais pas saisi tout ce que recouvre cette distinction. En partie, d'ailleurs, parce que j'étais dans mon "rôle de prof" ("a fortiori gardien de la paix, avant tout).<br /> <br /> Du coup je me dis qu'on évolue tous petit à petit, qu'il faut le temps de la maturation et que j'ai bien envie, à ma modeste manière, d'échanger avec des collègues pour faire évoluer nos représentations à tous, les miennes comprises. J'ai eu un gros coup de flip au congrès en entendant un prophète qui nous déversait la bonne parole du grand Célestin Freinet et dont il fallait appliquer les principes avec dévotion : Freinet a dit que ... N'oublions pas l'invariant n° tant ... On sait bien qu'il faut faire ainsi ...<br /> <br /> <br /> <br /> Bref, je me dis que c'est aussi une chance de ne pas être tout seul pour pouvoir, peut-être, contribuer à la remise en question des autres et ... de moi-même.<br /> <br /> bye, toujours très heureux de vous lire
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M
Oui, je partage ce ressenti!!!<br /> <br /> Je cherche une école, dans les alentours, où j' entendrai autre chose que " j'en ai 19 qui sont nuls!", une école où mon enthousiasme trouvera un écho !
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A
Je trouve tout ça bien triste, on a l'impression d'y être ou d'y avoir été et j'aimerais pas y retourner... Où est l'école de la bienveillance dont parle Mr Peillon? Je dirais que ça ressemble plutôt à une usine à briser! A briser les élèves, à briser les enseignants... et en série!!!! Comment s'épanouir et s'élever dans ces conditions? Comment montrer qu'il peut exister un autre chemin sans passer pour un(e) illuminé(e), un(e) irresponsable, un(e) incompétent(e)?<br /> <br /> Bon courage à toi, pense à toutes ces personnes que tu as rencontrées lors de ce congrès et qui étaient sur la même longueur d'ondes que toi!!!
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P
Courage L.H, j'étais dans le même état que toi il y a quelques années, j'ai démissionné après 2 ans de dispo et aujourd'hui je m'épanouis dans l'éducation populaire et spécialement la "conférence gesticulée" que je fais pour dénoncer ce système inhumain, autant pour les enfants que pour les enseignants. Infos : http://www.ensortantdelecole.wordpress.com<br /> <br /> Grâce à cette conférence, je rencontre tout un tas de gens qui ont vécu ou qui vivent encore la même chose que moi (alors que je me croyais à l'époque seule au monde, ne me reconnaissant pas dans mes collègues, encore moins dans les programmes et autres circulaires...), ma conférence gesticulée les aide dans le sens qu'ils-elles y trouvent un certain réconfort ("non, tu n'es pas seul(e)" ! Contrairement à ce qu'on veut nous faire croire...), certains veulent aussi en faire...<br /> <br /> Bref, l'idée c'est qu'on n'est évidemment pas tout(e) seul(e), qu'il faut continuer de croire en nos valeurs, pas se dire que c'est nous qui débloquons, et chercher un moyen (sans pour autant tous démissionner ! Quoique...) de lutter ensemble pour une école digne de ce nom !<br /> <br /> Plein de bises de courage,<br /> <br /> Pauline Christophe.
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