Pourquoi enseigner ?
Billet invité : Cyriaque Bessard
Dans les parcours de toutes celles et ceux qui s’engagent sur la route difficile des transformations, y compris personnelles, il y a toujours des rencontres dues au hasard, même s’il n’y a pas de hasard dans la quête. Un bouquin, une personne, à tel ou tel moment et pas à un autre. Il y a des tas d’ouvrages, des tas de personnes qu’aurait obligatoirement rencontré Cyriaque. C’est tombé sur un bouquin ! Mais c’est surtout tombé sur Cyriaque et de toute façon il serait tombé obligatoirement sur d’autres bouquins, sur d’autres personnes… et il n’arrête pas... parce que c’est un enseignant ! C’est l’enseignant qui est vraiment important dans ce billet.
Pourquoi enseigner ?
Voilà une question qui en début de carrière me paraissait être une évidence. (cela fait 7 ans que je suis instit). On enseigne pour le plaisir de se retrouver avec les enfants, pour leur apprendre des choses...
Et puis voilà que le quotidien de la classe commence à me faire penser...
C'est vrai ça ! Pourquoi j'enseigne finalement ? Certains apprennent, la classe semble tourner. Les «évaluations» sont bonnes. Bon c'est vrai que certains élèves ont de «mauvais» résultats, mais s'ils voulaient faire des efforts ça se passerait autrement... ! J'ai juste pu faire le constat qu'ils avaient des difficultés.
L'IUFM nous avait bien dit qu'il fallait différencier, que les élèves devaient être acteurs de leur apprentissages... C'est bien joli tout ça, mais moi je fais comment alors ? Je différencie comment ?
Je passe des heures les soirs chez moi à faire différentes fiches pour chaque groupe. Les bons, les moyens et les élèves en difficultés ? Ça ne peut pas fonctionner comme ça toute ma carrière ! Ce n'est pas tenable.
Du coup je commence à chercher sur la toile des mots que j'avais pu entendre rapidement un jour en formation. Freinet, plan de travail, coopération... Tiens c'est peut être ça différencier ?
J'applique quelques principes, mais là encore ce n'est pas vraiment ce que j'avais pu lire sur la toile ou dans les livres.
Et puis un jour on discutant avec des collègues on me parle d'un bouquin : L'école du 3e type, La pédagogie de la mouche. Pendant l'été je dévore le livre.
A la rentrée nous sommes deux collègues, dans la même école à vouloir nous lancer dans le 3e type (pour un an seulement, car être titulaire dans cette petite école a été une douce utopie).
Quelle richesse ! Une année d'intelligence collective, ça vaut toutes les formations du monde ! En plus je découvre que d'autres enseignants échangent sur leur pratique avec en ligne de mire l'école décrite par Bernard Collot.
Voilà enfin quelque chose qui fait sens ! Je viens de trouver une vision globale de ce qui pourrait être une école alternative, une école de la vie. Une école où chaque enfant est pris pour un être à part entière, dans le respect de sa personne.
Il ne s'agissait pas en fait de mettre bout à bout des techniques de quoi de neuf, de journal, de plan de travail. Ces outils existent bien entendu dans ma classe aujourd'hui, mais ils sont au service d'une vision globale de l'apprentissage de l'enfant.
Je me plais maintenant à ne rien programmer, planifier. Je vis avec les enfants sur le moment présent, sur les événements qui entrent dans la classe. Afin d'éviter d'employer le mot projet nous avons décidé en classe de parler d'activités désirées...
Je débute donc dans la pédagogie de l'improvisation ! Attention cela ne veut pas dire que je fais n'importe quoi. L'environnement de la classe se structure petit à petit. J'apprends à observer, à noter ce qui se vit au sein du groupe. Les outils sont de plus en plus variés. Les élèves prennent confiance en eux. Voici un article de Bernard Collot à ce sujet : La pédagogie de l'improvisation Et puis ici le site où l'on échange sur nos pratiques, en classe et par mails : http://arbustes.net/
Alors maintenant si on me demande pourquoi enseigner je réponds sans hésiter pour rendre les enfants heureux !
Si j'enseigne aujourd'hui c'est pour voir les enfants prendre plaisir à lire, à écrire, à échanger entre eux.
Si j'enseigne aujourd'hui c'est pour accompagner les enfants dans leur découverte, leur émerveillement du quotidien. C'est aussi pour les guider vers l'autonomie, vers ce qui pourra demain les aider à s'émanciper.
Et je sais maintenant que c’est comme cela qu’ils apprennent.
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