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Le blog de Bernard Collot
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28 septembre 2015

Eclipse de lune et représentations

eclipse

Les éclipses ont toujours été considérées comme un événement surprenant, extraordinaire ou inquiétant. Autrefois ce pouvait même être un signe des dieux.

Aujourd’hui il n’inquiète plus puisque l’on sait que c’est un phénomène, tout au moins les savants nous le disent puisqu’ils peuvent même nous dire quand il va se passer, se reproduire. Ils nous disent aussi pourquoi, on trouve l’explication dudit phénomène un peu partout. Normalement, on a dû l’apprendre à l’école, au collège… quoique…

Je suis surpris du nombre de jeunes et de plus âgés qui sont bien allés voir la fameuse éclipse de Lune, l’ont admirée, mais se trouvent bien embarrassés quand il s’agit de l’expliquer. C’est vrai qu’il faut être un peu tordu comme moi pour le leur demander !

Bon, la lune disparaît parce qu’elle est cachée par quelque chose puisqu’habituellement ce qu’on ne voit plus est caché, qu’il y a un rapport entre terre, soleil et lune, puisque tout tourne, on nous l’a suffisamment dit et nous l’avons suffisamment… appris. Lorsqu’il s’agit d’une éclipse de Soleil, c’est plus simple, il y a quelque chose entre le soleil et nous, nous sur la terre qui regardons, ce quelque chose qui cache le soleil ce ne peut être que la lune. Mais dans le cas d’une éclipse lunaire, le mot éclipse ne couvre pas le même phénomène.

Bien sûr, de mémoire on pourra répéter que c’est l’ombre de la terre, et après tout ça suffit comme réponse pour avoir une bonne note à l’école. Mais comment la terre va se mêler de faire son ombre sur la lune jusqu’au point de la cacher, c’est une autre affaire. Comme c’est une autre affaire aussi de savoir pourquoi la lune que l’on voit ressemble à un croissant qui s’agrandit, devient un disque, puis un autre croissant qui va s’amincir jusqu’à disparaître et revenir. Pour ramasser des champignons ou planter ses tomates, certains vont même consulter le calendrier lunaire et s’interroger chaque fois : qu’est-ce que je prends, la lune montante ou la lune croissante ? Pour les pieds de tomate, qu’ils montent ou qu’ils croissent, c’est pareil !

On nous a expliqué tout cela, verbalement, si on a une bonne mémoire on va pouvoir le répéter quitte à s’embrouiller un peu.

Autrefois, nous faisions de savantes démonstrations dans la pénombre de la classe avec une lampe électrique, un globe, une pomme et leurs porteurs qui tournaient. Nous, les enseignants, nous supposions que tout le monde comprenait, au moins tous les « intelligents ». Comprendre, peut-être, mais de là à se représenter que ce globe peinturluré était la terre qu’ils avaient sous le pied et qu’ils étaient sur ce globe, qu’ils tournaient avec lui, que cette pomme qui s’éclairait était la lune qu’ils voyaient eux, d’un point de cette autre boule sur laquelle ils étaient sensés être… et qu’ils ne tombaient pas lorsqu’ils avaient la tête « en bas »… il y avait un monde à franchir dont nous ne savions jamais s’il était franchi. On peut toujours « faire voir » l’ombre de la boule terre sur la boule lune, mais lorsqu’on regarde l’éclipse, il n’est pas évident d’être dans le phénomène et de le faire exister par ce que l’on voit (l’éclipse n’existe que si on est du côté nuit pour la voir ! Tant pis pour les autres !).

De nos jours, à l’heure où les animations sophistiquées vous font voir les mécanismes célestes comme si c’était en vrai, à l’heure où grâce à la vidéo et la télé vous pouvez vous imaginer dans la fusée et voir de là-haut, en vrai, notre boule terrestre, à l’heure où avec les astronautes vous pouvez mettre un pied sur la lune, on pourrait penser que c’est plus facile. Et bien apparemment non.

On se focalise sur le « comprendre » et sur le « expliquer » qui se font toujours en langage verbal. Or un phénomène physique ne s’appréhende pas avec le langage verbal mais avec un autre langage capable de créer d’autres types de représentations, appelons-le dans notre cas le langage scientifique. Ce n’est pas « savoir » qui est important c’est pouvoir créer et/ou interpréter des représentations qui ne sont pas la réalité perceptible par les sens, qui ne s’expriment pas par le verbe, celui-ci n’étant qu’un médiateur imparfait de communication.

Tous les enfants ont la même intelligence (il va falloir finir par l’admettre). Ce qui les différencie, ce sont les capacités de création de représentations qu’ils auront pu se développer ou qui au contraire auront été inhibées. Or nous nous évertuons et surtout l’école s’évertue à empêcher l’imaginaire, le tâtonnement de l’imaginaire, la confrontation des imaginaires, et ce dans tous les domaines que l’on pense n’avoir rien à voir avec l’imaginaire (scientifique, mathématique, historique, géographique…). Tout n’est que représentation avant d’être apprentissage, en particulier la science. Peu importe que l'imaginaire donne d'abord des représentations erronées, l'important est qu'il puisse s'exercer, se développer, puis se modifier dans les confrontations d'imaginaires.  Autrement dit l’école met la charrue avant les bœufs, Eistein nous l’a répété, ce n’est pas savoir résoudre des équations qui est important, c’est l’imaginaire !

Commentaires
N
et pourquoi elle est rousse, celle-là...
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