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Le blog de Bernard Collot
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11 mars 2021

Confinés, ils ne sont pas allés à l’école, mais ils ont rattrapé leur « retard » !

vieux

Surprise entendue à la radio : le ministre déclare que malgré l’absence d’école pendant le confinement «Tous les enfants auraient rattrapé leur « retard »  au bout de 3 mois », ceci étant bien évidemment dû à l’investissement des enseignants… et aux consignes du ministre. Je ne doute aucunement de l’investissement des enseignants, mais est-ce à dire qu’avant ils ne s’investissaient pas suffisamment ?! Est-ce à dire qu’à la rentrée toutes les méthodes auraient changé ?!

Ce constat aurait dû interroger, mais il est vrai qu’en matière d’école on se garde bien de questionner tout ce qui pourrait troubler les croyances et le système sur lequel elles se cramponnent. Les constats de ce type pullulent depuis plus d’un siècle, n’ont cessé d’être montrés, prouvés, dénoncés… part une myriade de pédagogues, philosophes, psychologues,…, à savoir : ce n’est pas à l’école (ou qu’à l’école) que les enfants apprennent, qu’ils n’apprennent pas comme on croit qu’ils apprennent.

En somme, pendant ce confinement on a été persuadé que les neurones des enfants allaient s’arrêter de fonctionner ! Comme on pense d’ailleurs que leurs longues vacances leur font perdre ce qu’on croit qu’ils ont acquis, ce qui ne devrait que confirmer que l’école ne le leur avait pas fait acquérir. Il ne fallait surtout pas que l’emprise de l’école s’arrête, quitte à demander aux parents d’en être momentanément le relai. On pourrait penser que c’est grâce à cette emprise maintenue que les fameux « retards » ont pu être ensuite résorbés, or personne n’ignore que tous les enfants ne sont pas dans les mêmes conditions familiales, sociales, d’environnement. Et pourtant ce sont bien de l’aveu du ministre lui-même tous les enfants qui ont repris le fil scolaire en rattrapant un soi disant retard. Autrement dit l’absence inopinée de l’école n’a pas eu les conséquences annoncées à grands cris. MAIS les écarts qui maintiennent les uns et les autres dans les catégories « bons » ou « en difficulté » dans la machinerie scolaire inchangée n’ont évidemment pas été modifiés, tout est donc bien comme un avant qui peut continuer à se dérouler.

Je ne reviendrai pas sur la fonction réelle de l’école d’État (voir entre autres les billets sur « école et société »), mais si légitimement parents, citoyen-ne-s, Nation sont soucieux que les enfants construisent les outils nécessaires à la compréhension du monde dans lequel ils sont, à leur autonomie, à leur agir dans et sur ce monde, il serait temps que tous se penchent sur les conditions qui font qu’un enfant apprend absolument tout dans les interactions avec un environnement physique et social et dans les interrelations avec leur entourage (famille, quartier, village...). Dans ce sens une autre école pourrait être un espace, un environnement où sont compensées les inégalités de conditions de vie dont souffrent une majorité des enfants. Il suffirait déjà de s’informer sur ce qui se passe depuis des décennies dans les rares écoles où sont appliquées des pédagogies actives, Freinet et de chercher à en comprendre les principes, de s’informer et d’aller voir ce qui se passe dans les écoles alternatives, dans le unschooling. Ceci serait déjà un début, mais nous avons aussi démontré dans nos classes uniques de 3ème type qu’on pouvait aller beaucoup plus loin : ce sont seulement les conditions dans lesquelles on permet à des enfants de vivre qui permettent la construction et l’évolution de tous leurs langages et leurs capacités d’apprendre tout ce dont ils ont et auront besoin, eux, pas nous !

La quasi totalité de ce blog ou de mes ouvrages est consacré à narrer, expliquer cela. Entre autres on peut toujours voir ou revoir ces billets La cause des causes - Ce qui est subversif, c’est comment les enfants apprennent - L’école et la lutte contre les inégalités, finalité -

Si on pouvait imaginer et souhaiter que la crise sanitaire allait faire ce que les crises sociales et environnementales n’arrivent pas à faire, ne plus recommencer comme avant, force est de constater que l’aspiration majoritaire reste encore recommencer comme avant ! Jusqu’à quand ?

Commentaires
M
Merci pour ce résumé. C'est clair !
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C
Une première chose me gène, la notion de retard: retard par rapport à quoi ou pa rapport à quel programme imposé. L'enfant ne peut entrer dans un moule préprogrammé; sa vie ne se passe pas qu'à l'école. Il acquière des connaissances et structure des compétences dans tous les espaces où il vit. Ce n'est pas parce que la société veut imposer un ordre au processus que cela es vrai pour chaque enfant. J'ai nommé en 1978 cet enfermement la scolaritude et cherché par tous les moyens de la contourner: <br /> <br /> Une seconde chose me gène encore plus. Monsieur BLANQUER a une piètre idée des capacités de chaque enfant à acquérir ce dont il se rend compte qu'il a besoin (entre parenthèse, je n'ai pas réagi au blog sur les besoins, ma réponse aurait été trop longue, donc ennuyeuse). Il pense que l'école est une organisation qu'elle doit être gouvernée et gérée selon des principe de management. On va assister à une Organisation Scientifique de l'Education le pendant du taylorisme dans l'école. Il y aura des bureaux des méthodes dans chaque établissement des normes précises pour juger des performances. On n'en est pas loin.<br /> <br /> L'école est un lieu de vie parmi de nombreux autres; elle a ses spécificités quant aux acquisitions que l'on peut construire. On a trop dramatisé son impact. La pandémie est un analyseur qui devrait nous permettre de la mettre à sa juste place. Mais les Pouvoirs vont tout faire pour qu'il n'en soit pas ainsi. Cela vaut la peine cependant de tenter quelque chose.
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