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Le blog de Bernard Collot
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14 novembre 2021

1940-2021 (23) - 1949-1956 Le 22 à Asnières

Et le téléphone !

ancien-standard-telephonique

 À Chavanoz il y avait beaucoup plus de monde qui avait le téléphone. Lorsque quelqu’un décrochait son téléphone il était relié au bureau de poste le plus proche et c’était d’abord quelqu’un de la poste qui répondait, il y fallait donc une présence jour et nuit. Dans le bureau il y avait un meuble avec un panneau sur lequel étaient des rangées d’autant de petits volets qu’il y avait d’abonnés. Lorsqu’un abonné appelait, son petit volet s’abaissait en tremblotant. En dessous autant de rangées de trous qu’il y avait de volets. Puis sur une tablette autant de fiches avec leurs câbles qu’il y avait de trous. Puis autant de petits leviers qu’il y avait de fiches.

Lorsqu’un abonné téléphonait son petit volet s’abaissait en bruissant, on prenait le combiné, on enfonçait la fiche correspondante dans le trou correspondant, on abaissait la manette correspondant et c’était le rituel :

- La poste de Chavanoz je vous écoute.

- Je voudrais le 22 à Asnières.

- Ne quittez pas je vous le passe.

On fermait sa manette. On enfonçait la fiche du central de Pont-deCheruy et on abaissait sa manette :

- Pour le 4 à Chavanoz je voudrais le 22 à Asnières

-  Ne quittez pas je vous le passe. »

 

téléphone

L’opératrice de Pont-de Chéruy devant un standard bien plus important faisait à son tour des manœuvres semblables vers un central encore plus important, et "au bout d’un certain temps" comme disait Fernand Reynaud :

Chavanoz vous avez le 22 à Asnières. Mais ce pouvait être :

- Toutes les lignes sont occupées, veuillez patienter ! D'où le fameux sketch de l'ami Fernand.

Lorsqu'enfin le correspondant était en ligne il fallait alors relever la manette du 4 à Chavanoz sans enlever la fiche de Pont-de-Chéruy : « Allo ! Vous avez le 22 à Asnières. Parlez. » Et puis baisser la manette du 4… sinon vous suiviez toute sa conversation sans qu’il le sache ! On la relevait quand même au bout d’un certain temps pour savoir s’il avait fini de parler et enlever toutes les fiches remettre toutes les manettes au repos… jusqu’au prochain coup !1

Mon père était donc de garde 24H sur 24H. Les fonctionnaires sont vraiment des feignasses bien payées ! Bien sûr ma mère le suppléait sans que ce soit dans ses heures d’auxiliaire. Lorsque le dimanche elle était à la messe ou qu’elle faisait des courses avec mon père, c’était moi de garde. Le stress quand je mélangeais les fiches, baissais la mauvaise manette, branchais des correspondants qui n’avaient rien à voir ou en désespoir de cause quand j’arrachais toutes les fiches… Le petit volet qui se rebaissait à nouveau rageur : « Qu’est-ce que vous fabriquez à la poste, vous m’avez coupé ! ». Au moins on pouvait s’adresser à quelqu’un pour rouspéter. Pour les vacances il y avait une pièce spéciale pour coucher le remplaçant et mes parents lui prêtaient la cuisine.

Il y avait aussi les télégrammes, même le dimanche. Cette fois en décrochant j’entendais « Un télégramme pour untel à telle adresse. Notez. » Il fallait attraper le papier bleu spécial et noter tous les mots en épelant « A comme Anatole, S Suzanne, N comme Noémie... ». En ville il y avait l’employé porteur de télégramme, le « petit télégraphiste », dans les petits bureaux c’était une personne proche qui en était chargée moyennant une petite somme à chaque télégramme porté… ou gratuitement le fils du postier ! Comme le coût du télégramme dépendait du nombre de mots c’était le style télégraphiste qui était utilisé : arrive demain 7 heures – stop – attends-moi – stop et fin. Les « stop » n’étaient pas décomptés comme mots ! Le coût des communications téléphoniques étaient aussi à la durée mais je ne me souviens plus comment c’était fait, en tout cas il valait mieux ne pas s’éterniser au téléphone.

Moi j’étais fils de postier, mais mes copains fils ou filles de commerçants, d’artisans, de paysans étaient aussi embauchés à moult occasion pour aider ou suppléer leurs parents dans leurs activités professionnelles. La famille même de fonctionnaires : entreprise obligatoirement coopérative !

C’est dans les années 60 que le téléphone automatique a été généralisé et que l’on a pu appeler directement son correspondant. À la place de la tablette manuelle il y avait un grand meuble métallique noir plein de fils et de connecteurs électromagnétiques. On savait que des tas de gens étaient en train de se téléphoer aux cliquetis et ronflements que faisaient les connecteurs.

 

Prochain épisode : Première voiture - épisodes précédents

1Plus tard, instituteur dans le Beaujolais, avec les enfants nous nous étions lancés dans une vaste recherche mathématique pour savoir comment calculer le nombre de fils reliant des téléphones si chacun devait être relié à tous les autres. En dessinant avec 3 téléphones, puis 4, puis 5... nous avions trouvé une formule, pas aussi simple que celle que Gaus, le prince des mathématiques avait découvert à 6 ans, mais elle marchait ! C’était à la suite d’une question d’un enfant qui avait vu des employés grimper au sommet d’un poteau téléphonique.

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