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Le blog de Bernard Collot
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2 février 2022

1940-2021 (50 - Années 60 : La plage

La côte languedocienne jusqu’aux années 60

 

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Lorsque nous étions à Coursan, la mer était seulement à une quinzaine de km, nous y allions donc très souvent près de l’embouchure de l’Aude aux Cabanes de Fleury.

La côte du Languedoc n’a été aménagée et transformée que fin des années 60 à des fins touristiques peu de temps après celle des Landes. Elle était encore sauvage. Les marais entre les étangs et la mer n’étaient pas asséchés, il n’y avait pas encore eu la démoustication massive au DDT, les plages n’étaient pas nettoyées et étaient encombrées par les branches et arbres morts qui étaient amenés par les tempêtes ou les crues de l’Aude…

Il n’y avait donc pas un seul touriste. Par contre c’était le lieu des WE, des vacances de tout le petit peuple de l’arrière pays. L’été c’était l’incroyable occupation sauvage de la plage de Fleury par des tentes, des vieilles caravanes, il y avait même des cabanes composées de planches, de toits en tôle… Un étonnant bidonville de vacances !

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Toute la famille de Coursan y avait fait sa propre cabane avec un vieux matelas, des vieilles chaises et table de camping, et chacun l’occupait à tour de rôle. C’était en quelque sorte leur résidence secondaire ! Nous y avions passé 15 jours de vacances plus que pittoresques. En retrait, là où les tempêtes n’arrivaient pas il y avait un ou deux robinets pour l’eau douce, j’ignore comment il était arrivé là. Toujours en retrait il y avait un ou deux WC très sommaires... et odorants ! Devant, comme devant les robinets, c’était la queue, il valait mieux ne pas avoir la colique. Je ne me souviens pas comment nous faisions avec les poubelles.

L’ambiance valait aussi son pesant d’or. C’était bruyant, coloré, sympathique. Beaucoup se connaissaient puisqu’ils venaient des mêmes villages et nous avions vite fait connaissance avec tout le voisinage. Parce qu’il fallait bien s’entraider, aller faire des courses pour s’approvisionner à Fleury pour des voisins,… Facile aussi de faire des barbecues, il n’y avait qu’à aller ramasser du bois mort qui trainait. Des vieux catalans m’y avaient appris le lancer à la manière d'une fronde. Connaissez-vous ? Au lieu de lancer une pierre à bras cassé, vous la lancez en faisant tournoyer le bras tendu. Je me croyais fort pour lancer un projectle au plus loin comme on le fait généralement et à chaque fois j’étais battu ! Les soirs il y avait toujours une guitare dans un coin ou des sardanes qui s'improvisaient. Quant aux mômes, entre l'eau à côté, le sable il y en avait partout... sans trop de surveillance. Normal, ils étaient presque chez eux !

Il n’y avait que les moustiques le soir qui ternissaient un peu le tableau. Eux aussi étaient chez eux !

Les 15 jours que nous y avions passés ont été inoubliables ! Il est évident qu’un tel bidonville était un véritable chancre dans le paysage languedocien, une plaie anti-touristique, mais les autorités avaient du mal à s’en débarrasser, c’était quasiment la richesse de toute une population peu argentée et il n'était pas facile de la déloger. Aujourd’hui de telles conditions sanitaires feraient frémir tout le monde d’horreur.

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En 1965 la crainte d'une épidémie de choléra qui touchait l’Algérie a enfin donné l’occasion de tout balayer au bulldozer et l’aménagement touristique a pu commencer. Désinfection, démoustication, nettoyage régulier du sable des plages, constructions d’hôtels, de boutiques, de voies routières, etc. Fini le pittoresque, tout était net net, propre, aseptisé… et payant.

 

Début des années 70 nous allions un peu plus loin dans un camping naturiste à Sérignan-Plage. Le naturisme populaire était né dans la foulée de 1936 et des congés payés, sous l’instigation et dans la philosophie sociale d’Albert Lecoq. Il commençait juste à être accepté dans les espaces collectifs privés et un morceau de plage contigüe dédié au naturisme était autorisé si signalé (j’en parlerai dans un prochain épisode). Comme ils étaient rares, le camping naturiste créé par des ouvriers et petites gens de Montpellier était très fréquenté. Deux frères vignerons du Cap d’Agde avaient de maigres vignes peu rentables allant jusqu’à la mer. Reniflant l’affaire entrevue avec le voisinage de Sérignan, ils créèrent leur propre camp naturiste, mais ils durent faire appel aux banques pour les investissements nécessaires, et leur propriété fut achetée un bon prix par une ou deux grande sociétés, reniflant encore plus la bonne affaire.

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C’est ainsi que le Cap d’Agde qui n’avait jusqu’alors aucune renommée fut transformé, bétonné, en un immense et luxueux ensemble naturiste. Mais ce n’était plus du naturisme social et philosophique, c’était devenu le naturisme du luxe et du sexe. Sur la côte landaise il y avait Montalivet, cependant beaucoup moins luxe et sexe puisqu’à l’origine il avait été créé par Albert Lecoq.

Les vastes aménagements touristiques des côtes avaient bien sûr des raisons économiques et pas philanthropiques. Je ne sais pas si les populations autochtones agricoles et ouvrières en ont vraiment profité. En tout cas cela en a été fini pour elles les vacances gratuites en bord de mer !

On ne peut pas dire que ces entassements sauvages momentanés  d'autrefois étaient très bons pour l’environnement, mais le polissage, l’aseptisation, le bétonnage actuel pour d’autres entassements périodiques encore plus vastes et généralisés l’est-il mieux pour les côtes, la végétation, les animaux, les humains locaux (les indigènes) qui y vivaient ?

 Prochain épisode : Les technologies, l'image et la communication début des années 60 -  épisodes précédents ou index de 1940-2021

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Commentaires
L
bonjour Merci pour cet article plus clair que " le long des golfes clairs ", avec des " reflets de beaucoup d'argent ". Je suis autour du bassin d'Arcachon et des Landes et tout autant<br /> <br /> effaré devant les mêmes phénomènes. Il n'y a rien à faire devant l'envahissement du béton, reflet de la surpopulation. J'arrive encore à trouver dans les Landes des plages sauvages, où nous ne sommes que quelques-uns à écouter le bruit des vagues. Et seulement cela. On en profite tant que ..........
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