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Le blog de Bernard Collot
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11 mars 2022

1940-2021 (65) - 1969 - La fascination de la technologie, de l'image,... l'espace.

 

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Si d’un côté il y avait les fortes alertes du mouvement écologique naissant, les débuts de l’agriculture bio, du retour à la nature mais ceci restant quasiment confidentiel, de l’autre il était difficile de résister au galop des technologies. Difficile aux agriculteurs de résister à tous les produits tout prêts à être répandus systématiquement et avec le mode d’emploi plutôt que d’avoir à observer, tâtonner, essayer, difficile de résister à l’alimentation artificielle du bétail, à l’ensilage et aux machines agricoles qui apportaient un faux confort dans le travail. Un oncle bressan était très fier de la transformation de sa ferme en élevage bovin en batterie, il la faisait visiter et on ne pouvait pas trop lui en vouloir. Ce n’est qu’après qu’il a compris l’esclavage dans lequel il s’était engagé : par la suite il s’est suicidé lorsqu’il a été déclaré en faillite et sa ferme récupérée par les banques. Sans mon enfance et une partie de ma famille rurale je n’aurais probablement eu aucune conscience de la voie dans laquelle avaient été engagée l’agriculture et ses agriculteurs autant par le monde de la finance que par la chimie.

Difficile de résister à toutes les innovations techniques en continu, à ne plus avoir les grésillements du pick-up sur les vieux disques en cire et d’écouter des microsillons sur des chaînes stéréo, à n’avoir plus qu’à appuyer sur des boutons même pour ouvrir les vitres de sa bagnole, etc., etc.

Cette impression que la technologie et la science nous rendaient maîtres du monde avait été particulièrement ancrée par la réalisation du rêve impossible d’Icare, la conquête de l’espace. Je suppose qu’à d’autres époques les voyages autour de la terre, Pasteur et son vaccin contre la rage, les machines à vapeur, les premiers avions,… avaient aussi contribué à la déification de la science, du rationalisme cartésien qu’il devenait insensé de mettre en doute.

L’énorme événement fin des années 60 fut la conquête de la lune.

 Le 21 juillet 1969, les premiers pas sur la lune

Il y avait bien eu avant les premiers avions supersoniques avec leurs bangs et nous apprenions ce qu’était le mur du son et qu’il pouvait être franchi. Il y avait eu le premier spoutnik et le premier vol de Gagarine. Mais ces deux derniers événements placés dans le contexte de la guerre froide par les radios et la presse écrite de l’époque qui ne s’y attardaient pas trop provoquèrent en général plus de scepticisme et de crainte que d’émerveillement. Mais, en juillet 1969, ce fut la stupéfaction.

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Cette fois, bien avant, ce qu’on pourrait appeler un matraquage radiophonique et télévisuel nous avait prévenus qu’il allait peut-être se passer quelque chose d’exceptionnel. Tous les jours Albert Ducrocq à la radio, François de Closets à la télé faisaient de véritables cours, fort bien faits et passionnants d’ailleurs, sur tout ce que nous devions savoir sur l’attraction terrestre, l’apesanteur, les fusées… C’était un véritable feuilleton scientifique qui était raconté avec lyrisme et nous tenait en haleine en maintenant un suspens grandissant dans l’attente du jour J. Il y avait bien peu de personnes qui ignoraient ce qu’était la NASA.

Et le jour J, le 21 juillet, ce fut grandiose. Le plus fantastique spectacle télévisuel en continu et en direct qu’il m’ait jamais été donné de voir. Je suis resté pratiquement un jour et une nuit scotché devant le poste de télé alors que dehors il faisait un soleil magnifique. Le spectacle nous plaçait aussi bien parmi les équipes de la NASA devant une multitude d’écrans et se préparant aux impondérables, qu’aux premières loges pour voir le lancement de la fusée, que dans la fusée, nous faisait entendre en direct ce que disaient les astronautes…et nous avons carrément mis le pied sur la lune en même temps qu'Armstrong.

C’était tellement incroyable que par la suite certains se sont demandé si cela n’avait pas été l’énorme mise en scène d’un film de fiction produit dans la lutte d’images des deux ennemis de la guerre froide. Il faut reconnaître que la diffusion de l’événement a bien contribué à la gloire des États-Unis faisant oublier un moment la guerre du Vietnam.

Il a été impossible, tout au moins pour moi, de ne pas être pris par une forte émotion en voyant comme si nous étions nous-mêmes déjà sur la lune, Armstrong y poser le pied. L’épilogue d’une aventure dont nous pouvions presque croire que nous étions aussi du voyage. Je me demande d’ailleurs si le plus extraordinaire n’avait pas été la fantastique couverture de l'événement en direct, en continu, sous tous ses angles par les images des caméras et leur transmission quasi instantanée à travers l’espace.

Difficile après cela de ne pas croire que tout était possible à l’espèce humaine. Les scientifiques nous expliquaient toutes les conséquences, toutes les avancées qui allaient pouvoir être tirées de cette conquête et des conquêtes futures qui s’annonçaient. J’avoue que je n’avais pas su quoi répondre à Bine, un vieux paysan toujours bougon que j’aimais bien :

« Ça va servir à quoi tout ça ? Ça va mieux faire manger mes bêtes et les gens ? D’aller dans la lune ça va améliorer mon sort ? »

Ce n’est que beaucoup plus tard que je me suis demandé moi aussi si les énormes moyens utilisés pour ces conquêtes comme pour beaucoup d’autres choses cataloguées d’avancées, d’innovations, comme pour les événements qu’on veut planétaires, qu’ils soient jeux olympiques ou autres, n’étaient pas plutôt le signe d’une stupidité de l’espèce humaine quand il devient de plus en plus difficile de vivre sur notre planète, qu’elle est de plus en plus invivable, sur le plancher des vaches et de la réalité comme aurait dit mon vieil ami. Aujourd’hui il me dirait peut-être « À qui profite le crime ? » Voyons, comment la science pourrait-elle être criminelle mon vieux Bine ? Je connais sa réponse « C’est comme ma fourche, ce n’est pas elle qui peut tuer quelqu’un, c’est celui qui s’en sert ! »

 Épisode suivant :épilogue des années en Beaujolais -  épisodes précédents ou index de 1940-2021 

 

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