Pourquoi je ne serai pas en grève le 14 !
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Billet invité : Laurent Lançon
Je défends l'ouverture de l'école sur le local (village, associations, habitants, parents...).
Je défends une école ouverte, pensée comme un lieu de rencontres, pierre angulaire d'un village, qui permettrait les échanges intergénérationnels, l'enrichissement mutuel (village/école; école village), laissant entrer la vie extérieure à l'école.
Trop souvent, les écoles sont des lieux fermés et déconnectés avec les villages. Dans une bonne partien du mouvement Freinet, on défend cette idée : faire sauter ces barrières entre les gens. Enrichir, faire entrer la vie dans l'école... Faire de l'école un lieu de rencontres : conclusion de Jacquard lors de son intervention sur Hauteville lors de la rencontre « apprendre autrement: faire de l'école un système vivant et sécurisant » en 2012. Merci Albert. Repenser l'école...
Cette réforme ouvre à cela. Elle ouvre les possibles. Evidemment, aujourd'hui, on en est très loin. Je ne cache pas que je suis déçu de voir comment les choses tournent. On botte en touche par commodité. On ne peut pas. Point. Chacun y allant avec ses propres arguments. Mairies, parents, enseignants avec des raisons parfois assez opposées. Chacun étant dans sa vérité, submergé par le quotidien... Le ras le bol est grand... Partout !
Personne ne semble vouloir s'investir dans l'école et laisse cette tâche aux PE. Chacun son job... Pourtant, l'école c'est l'affaire de tous ! Il y a tant de choses à faire pour l'enrichir et la transformer. Une école, ça ne doit pas rester un iceberg déconnecté du local et des gens qui vivent dans les villages. Il faut faire du lien.
On a une école qui cloisonne et segmente. Il faut en avoir conscience aussi... On a un chantier énorme pour transformer l'école... La refondation...
Pour ce qui est de mon positionnement politique, il ne peut y avoir de creusements entre les communes riches et les communes pauvres. Cet écart existe déjà. Avec la réforme actuelle, certes on l'accentue. L'Etat devrait pouvoir assurer un périscolaire de qualité, partout, pour tous en revitalisant les associations gravitant autour de l'école ! En s'appuyant sur le local évidemment, en y mettant des moyens pour faire vivre l'ESPER (économie social et solidaire) par exemple et pousser vers d'autres solutions que le tout marché.
Pour ce qui est de ma position syndicale, il en va de même. Je ne peux accepter les raccourcis faciles et réacs qui proposent :"retrait, retrait, retrait !". On oublie l'essentiel, je pense. On propose quoi au final à par ça ? Parce qu’il ne faut pas se leurrer, si retrait il y a, c'est mort pour des siècles pour repenser les rythmes de l'enfant... On défend le statu quo sur la semaine de Darcos alors ? Il n’y a rien à repenser sur le rythme de l'enfant ? On jette le bébé avec l'eau du bain ?
Je me méfie énormément des discours réducteurs et les raccourcis faciles. Je ne surferai pas et n'amplifierai pas l'ambiance générale
nationale : bonnets rouges (qui n'est pas un mouvement de même nature que ce qui suit mais qui peut de l'extérieur donner cette impression via les médias. Il demande une analyse fine qui est loin d'être simple actuellement...), tous pourris, vive Marine, non à l'impôt, chacun pour soi, les sans papiers dehors, la France aux français, c'est toujours les mêmes qui payent, touche pas à mon mercredi matin, les syndicats servent à rien, insultes à l'encontre de Taubira...).
C'est un mélange hétéroclite, assez inédit, qui met en lumière les tensions extrêmes qui parcourent notre société aujourd'hui. Les glissements et les raccourcis sont légions. On fonce droit vers des années sombres, très sombres, je pense...
Je ne cesse de m'interroger sur les gens qui se mobilisent sur la question des rythmes et pas sur les retraites par exemple. Nous sommes tous la tête dans le guidon et réagissons sur le court terme. Nous avons tous une très grande responsabilité. Nous devons tous permettre un éclairage différent et élever les débats pour que nous sortions par le haut de cette impasse que l'on propose. Ne nous laissons pas glisser sur les pentes faciles et réductrices !
Nous avons un énorme travail pour faire avancer nos revendications qu'elles soient pédagogiques, syndicales ou politiques.
Pour toutes ces raisons, je ne serai pas en grève le 14 novembre.