Alors n’importe qui peut être enseignant ?
Sous-entendu, dans une école du 3ème type.
Transcription d’une conversation récente (quelque peu arrangée !) provoquée par cette question fréquente.
- Bien sûr que tout le monde peut être enseignant… à un moment ou à un autre. Si je te demande de m’apprendre à tailler, te connaissant je sais bien que tu en seras incapable. Mais si je le demande à Lolo, il me dira « Prends un sécateur et viens avec moi dans ma vigne. ». Mais, toujours te connaissant, si je te demande de m’apprendre à me servir d’un caméscope, tu me diras « Apporte-le moi et on va voir ». La question est donc réglée ! Dans la vie il y a une infinité d’enseignants.
- Oui, je comprends bien, mais dans une école du 3ème type il s’agit bien que des enfants « apprennent », excuse-moi d’employer ce terme, à lire, écrire, etc. N’importe qui pourrait s’occuper d’une école du 3ème type, des parents comme moi par exemple ?
- D’abord le terme de plus en plus employé pour les permanents de ces lieux n’est plus « enseignants » mais « facilitateurs ». Comme nous avons déjà beaucoup parlé non pas des apprentissages mais de la construction des langages, tu sais que toi-même es et as été un remarquable facilitateur pour que tes enfants parlent, marchent et bien d’autres choses encore. Tu sais même tout ce que tu peux faire pour cela. Mais tu le fais dans le puissant lien affectif qui te lie à tes enfants, tu le fais dans l’entité naturelle qu’est ta famille et que tu cherches à ce qu’elle soit la plus harmonieuse possible, disons la plus heureuse possible. Et ton attention est concentrée sur tes seuls enfants.
Dans l’autre entité qu’est une école du 3ème type, c’est un peu différent, tu ne pourrais plus y être dans la même posture, dans les mêmes liens affectifs, il ne s’agit plus de tes enfants mais d’enfants, l’environnement n’y est plus le même, les enfants y sont plus nombreux, ils ont eux aussi d’autres parents …, tu devras aussi travailler et t’entendre avec d’autres adultes facilitateurs,… mais il n’y a aucune raison pour que les conditions et les processus qui ont permis à tes enfants de parler (et peut-être même de lire) soient différents pour la poursuite de la construction de tous leurs autres langages. C’est ta posture, ta position dans cette autre entité qu’il va t’être plus difficile à transformer quotidiennement. Déjà cela n’est pas donné à tout le monde.
- Admettons que je puisse le faire. Il faut bien quand même que j’ai des connaissances. Je ne vois pas un illettré devenir facilitateur de l’apprentissage de l’écrit ! Je suis nul en math, n’ai jamais pu apprendre un instrument de musique…
- Tu vois, tu as du mal à balayer ta représentation « enseigner » ! J’ai raconté la première expérience de l’apprentissage massif de la natation directement en grand bassin où, à la surprise générale et à celle des premiers concernés, les meilleurs « résultats » avaient été obtenus par les instits ne sachant pas nager[1] ! D’une part l’accent n’était pas mis sur des techniques d’apprentissage de la nage mais sur les conditions qui permettaient la conquête de l’évolution en milieu aquatique (nager, pas forcément brasser ou crawler), d’autre part qui peut mieux connaître les obstacles à lever pour cette conquête que celui qui s’y est heurté[2] ? On aurait beaucoup à apprendre des illettrés !
Il n’est pas dit que Gauss, prince des mathématiciens, aurait été un bon facilitateur du langage mathématique ! Pour rester dans le langage mathématique qui est encore celui qui pose le plus d’interrogations[3], le problème n’est pas son apprentissage mais l’entrée dans un monde différent des autres aussi créés par d’autres langages. Ce monde, tous les cerveaux ont la capacité de le créer et les enfants comme toi vivent dans une réalité en partie façonnée par le langage mathématique. Si tu as cette conscience, si tu as en plus conscience de n’avoir pu vraiment entrer et jubiler toi-même dans le monde mathématique, tu sauras repérer chaque fois que les enfants consciemment ou inconsciemment sont dans ce monde et les inciter à en poursuivre l’exploration en évitant de placer les obstacles que tu as subis. C’est cela l’important : enlever les obstacles et surtout ne pas en mettre.
- Je conçois que tous les enfants rentrent naturellement à un moment ou à un autre dans n’importe quel langage quand ils sont libres d’évoluer, d’explorer et d’interagir dans leur environnement. Mais il y aura bien des moments où je ne pourrai répondre à leurs question, leur donner des idées, les aider à aller plus loin !
- Eh ! Mais tu ne seras pas seul ! Il y a tous les autres enfants, tous les autres adultes qui passent, qui peuvent venir dans l’école, que vous pouvez inviter à venir, il y a aujourd’hui tous les moyens d’information… Les « enseignants », quand il y en a besoin, quand ils sont demandés, ils sont là. Il est probable que tu apprendras autant que les enfants, par les enfants. C’est l’ignorance qui fait aller plus loin, ta propre ignorance aussi[4].
- Oui mais alors il faut quand même avoir compris (ou appris !) ce que sont les mathématiques, ce qu’est le langage écrit, le langage scientifique, etc. Cela nous ne l’avons jamais appris ni à l’école ni même plus tard si on poursuit à l’Université. On pense couramment que si on s’engage dans une voie, c’est parce qu’on était un peu doué pour ça ou qu’on a eu un prof qui a su nous intéresser.
- Pourtant si ! Tu l’as appris quand tu voyais vivre tes enfants, mais tu n’y as simplement pas été attentif ou cela t’a échappé parce que tu ne cherchais pas à être un enseignant… et tes enfants se forgeaient leurs outils langagiers sans que tu le saches forcément ! Ces outils étaient déjà en latence quand ils sont allés à l’école qui s’est évertuée à empêcher toute interaction ne venant pas d’elle. Personne ne sait exactement les circonstances, les stimuli qui ont provoqué ou empêché l’engagement dans telle ou telle voie, encore que l’on sache bien maintenant une partie de ce qui a empêché. Le travail d’un facilitateur va donc être de permettre l’infinité des interactions et des interrelations… qu’il ne peut pré-déterminer.
Mais tu as raison : il est utile que ceux qui ont à s’occuper de ces lieux de 3ème type sachent ce qu’est un langage, ce qu’est l’informel, comment il agit, qu’ils aient abandonné leurs vieilles représentations. Ce n’est pas facile de se débarrasser de ce sur quoi on s’est institué. Pouvoir prendre une autre posture ne suffit pas. La bienveillance ne suffit pas.
- Donc n’importe qui ne peut pas devenir « facilitateur » dans une école du 3ème type ! Il est bien nécessaire d’avoir des connaissances, des compétences. Alors lesquelles ?
- Si le « n’importe qui » signifie quel que soit son bagage culturel ou scolaire, oui n’importe qui peut devenir un « facilitateur » éducatif (et même un facilitateur social, il y en a beaucoup qui le sont instinctivement sans même le savoir). Les malheureux futurs profs doivent se bourrer le crâne de savoirs pour se rendre compte le premier jour de classe qu’ils leur sont complètement inutiles… quand ils ne les ont pas oubliés le lendemain du concours. Il n’est pas nécessaire « d’avoir des connaissances » mais d’être « ouvert aux connaissances », c'est-à-dire capable de chercher ailleurs ce qui peut éclairer une problématique que tu as à résoudre.
Le « ailleurs » est d’abord chez tous ceux qui sont ou ont été dans un lieu semblable. Ce ne sont pas les modèles l’important, ce sont les expériences (les vécus). Il est dans tout ce que tu peux lire sur les systèmes vivants (les enfants, toi-même, l’école.. sont des systèmes vivants !). Si tu étais agriculteur biologique, tu saurais déjà presque l’essentiel ! Avoir une idée de la systémique, suivre où en sont la psychologie, les neurosciences, la psychosociologie,… et peut-être même la philosophie, cela peut t’aider, je dis bien t’aider, pas te donner les solutions.
Certes des connaissances vont t’être utiles, mais ce sont des connaissances décalées par rapport à celles auxquelles on se réfère habituellement dès que l’on parle d’apprentissages et tu n’as pas besoin d’être savant pour en avoir au moins une idée.
- Alors la pédagogie est inutile ?
- Oui et non !
Oui ! Parce que tu ne te trouveras plus (et surtout les enfants) dans les contraintes dans lesquelles se sont élaborées les grandes pédagogies modernes.
Non ! Parce que ce sont ces pédagogies qui ont permis d’entrer dans le paradigme des écoles du 3ème type. Il te sera utile de les connaître, leurs principes, leurs histoires. Peut-être même qu’au début tu auras besoin d’elles ainsi que les enfants ne serait-ce que pour vous sécuriser, pour comprendre dans une structure plus cadrée sur quels principes elles s’appuient avant que ces principes ne soient appliqués naturellement dans une liberté complète. Mais tu lâcheras vite les béquilles.
Et, entre nous, la pédagogie c’est les mille façons possibles d’aider quelqu’un, d’aider un groupe,… qui le demandent ! Nous sommes tous des pédagogues qui s’essaient.
- Il n’empêche que cela demande bien des compétences particulières ou si tu aimes mieux un état d’esprit particulier. Finalement, qu’est-ce qui est difficile ?
- Ce qui est difficile (donc intéressant !)
Accepter l’incertitude et le tâtonnement expérimental permanent dans l’action (pas de modèle ni de mode d’emploi !). Tu ne seras jamais maître de ce qui va se passer. Mais en même temps tu dois avoir la certitude que dans tout ce qui va se passer, se faire, les enfants se construiront en étant, eux, maîtres de leurs trajectoires.
Etre celui (ou parmi ceux) qui dans l’observation permanente de la structure doit permettre que celle-ci favorise toujours l’interaction et l’interrelation. Etre à la fois à l’intérieur de la structure (tu en fais partie) et à l’extérieur. Ce lieu est comme un voilier avec son équipage qui doit bénéficier du voyage et c’est le bateau qui doit requérir ton attention. Tu auras peut-être à faire hisser ou amener une voile, modifier un gréement, donner un coup de barre, aider à traverser des turbulences, aider à nouer un cordage…
Comprendre ce qui fait être et agir les autres ; dans les autres du bateau il n’y a pas que les enfants, il y a les parents, d’autres adultes ; c’est avec ces derniers que c’est le plus difficile. La plupart des dysfonctionnements sont dus à des « non dits », faire exprimer les « non dits » est indispensable pour que tout le monde se retrouve dans le même sens et que le bateau navigue dans une direction et parfois modifie son cap si besoin est. Or autant il y a d’individus, autant il y a de divergences dans les attendus, les désirs, les croyances… Faire que tout le monde aille dans le même sens n’est pas du tout évident et c’est là que tu dois être un véritable ingénieur de la navigation sociale, que tu aies été le concepteur du navire ou que celui-ci ait été conçu par ceux qui veulent y embarquer leurs enfants. Les problèmes sont rarement là où on les situe dans un premier temps, c’est cela la systémique.
- Cela nécessite donc une formation ? Il y en a beaucoup de tous ordres en ce moment, je pense aux intelligences multiples de Gardner ou à la gestion mentale de la Garanderie ou à la pédagogie Montessori, Freinet, la pédagogie institutionnelle, l'éducation non violente… Qu’en penses-tu ?
- J’ai déjà dit ce que je pensais des formations (ici). Je répondrais que… ça ne peut pas faire de mal ! Si cela ouvre l’esprit à d’autres réflexions, change le regard et permet des rencontres. Cependant il ne faut pas qu’elles enferment l’esprit dans ce qui devient ensuite un mode d'emploi, dicte un cadre. « Je fais du La Garanderie, du Peter Gray, du Freinet, du Montessori… » [5] Ils ont ouvert des portes, mais tu ne vois pas ce qu’ils en ont fait sur le terrain, quel était ce terrain (le plus souvent celui du système éducatif habituel) certains n’y ayant d’ailleurs jamais été. Or tu seras sur un terrain complètement nouveau, tu y retrouveras probablement des éléments mis au jour par les uns et les autres mais c’est le terrain (donc les enfants en liberté) qui te formera en même temps qu’il te déformatera !
- Autrement dit ceux qui apprennent dans une école du 3ème type ce sont les adultes facilitateurs !
- Tu as raison ! Mais ce simple fait te place dans la même dynamique que les enfants et te fait participer directement à la dynamique du groupe. Les enfants sont naturellement des chercheurs, des expérimentateurs, des tâtonneurs. Sur ce plan tu es comme eux et pas dans une position de domination, tu pourras être plus facilement reconnu à ton tour dans les multiples interrelations. Ce qui ne veut pas dire que tu es au même niveau qu’eux, niveau n’étant pas compris comme supérieur ou inférieur, mais prôner l’égalité enfants/adultes est un non sens (sauf en ce qui concerne l’égalité des droits). C’est ta position qui n’est pas la même parce que toi tu es dans l’entité pour que cette entité fonctionne et soit féconde. Tu n’as pas pour ce faire une supériorité due à un statut, mais tu as d’une part une beaucoup plus longue expérience de vie qui te permet d’être un recours, d’autre part tu es là uniquement pour cela, ta recherche concerne uniquement cela.
- Tu vas te mettre à dos tout le monde enseignant obligé de descendre de ses estrades ! Beaucoup de ces enseignants pensent sincèrement que ce qu’ils dispensent, demandent aux enfants, organisent pour les enfants est fait uniquement pour qu’ils « s’élèvent ». Très peu ont l’impression qu’ils formatent des enfants mais au contraire la majorité pense les émanciper. Tu dis en quelque sorte qu’ils sont ou ont été inutiles, voire néfastes. Avoue que c’est difficilement audible alors que réellement ils consacrent leur vie au bien des enfants et qu’ils en sont convaincus, que certains vont vers un peu plus de libération par le biais des pédagogies en prenant des risques.
- Ce ne sont pas les enseignants qui sont néfastes (quoique certains le soient vraiment) mais la conception et la finalité du système éducatif qui les emploie et dans lequel ils opèrent. J’admire ceux qui tentent malgré tout d’en atténuer les effets et heureusement pour les enfants et adolescents dont ils ont la charge. Mais eux-mêmes disent bien toutes les difficultés qu’ils ont pour le faire dans les contraintes du système.
Il est vrai que dans une école du 3ème type c’est un autre métier qui n’a pratiquement plus rien à voir avec enseigner. Je comprends que cela soit déstabilisateur et qu’il faille réaliser une révolution copernicienne de la pensée. Cependant, au vu du nombre grandissant d’enseignants qui quittent l’école publique pour aller dans les écoles alternatives, beaucoup ont bien conscience que les enfants et les adolescents ont besoin d’autre chose que cette école. Ce qui ne veut pas dire que ce sera plus facile (sauf pour les enfants !), qu’ils y auront moins à s’investir, au contraire. Mais ils n’auront plus à attendre (et faire attendre les enfants) le grand soir où toute l’école changera, grand soir qui n’arrive jamais.
- Pourtant bon nombre d’enseignants, en particulier dans les mouvements pédagogiques, militent dans son intérieur depuis des décennies pour la faire changer cette école, même si ce n’est pas vraiment pour une école du 3ème type. Il n’y a aucun espoir ?
J’ai cru pendant longtemps que l’école publique pourrait devenir de 3ème type, puisque quelques-uns nous l’avions fait, puisque tout le monde convient qu’il faut la changer, puisque les sciences neurobiologiques corroborent depuis quelques années nos approches, puisque l’école, telle elle est, est reconnue comme a-socialisante ou dé-socialisante et ne fait qu’ancrer les maux d’une société qui s’autodétruit. Force m’est de constater le poids des représentations, y compris celles des enseignants sans mettre en doute leur bonne foi et leur volonté. L’approche systémique nous a appris à quel point ce sont les systèmes fermés qui résistent sans même que ceux qui les composent ne se rendent compte qu’ils y participent. Ceux qui voudraient les changer opposent simultanément les arguments qui l’en empêche. Par exemple le principe d’égalité brandi pour que ce soit pour tout le monde la même chose dans la même machine, en reconnaissant que tous les enfants n’en tirent pas les mêmes profits mais en exonérant la conception de l'école de cela.
Je pense aujourd’hui que c’est bien en dehors de ce système que peut naître et se développer un autre paradigme. Le système a bien senti le danger pour lui-même et use de ses pouvoirs pour tenter de l’enrayer (voir le dernier décret sur le contrôle des écoles hors contrat dans le silence absolu des mouvements éducatifs progressistes). Quitter l’école où l’on enseigne pour ne pas enseigner ( !) dans une école du 3ème type, non seulement c’est se subvertir soi-même (donc s’exposer) mais aussi subvertir le système en rendant visible une autre voie radicalement différente.
- Je reviens à ma question de départ et je résume : dans une école du 3ème type on n’est plus enseignant mais facilitateur. Alors n’importe qui peut devenir facilitateur dans une école du 3ème type… s’il a la volonté et l’humilité d’apprendre à l’être ! Serait-ce la fin de la corporation enseignante ?
- Dans notre histoire il y a bien des fonctions qui ont pu paraître indispensables et qui ont disparu ou complètement changé, les allumeurs de réverbères, les gardes-champêtres, les colporteurs (qui ont joué un rôle dans l’alphabétisation[6])… Les médecins d’aujourd’hui n’ont plus rien à voir avec les barbiers-chirurgiens du XVIIème siècle ordonnant et exécutant les saignées ! Il serait surprenant qu’il n’en soit pas de même pour les enseignants, je crois que la mutation ne pourra faire autrement que s’enclencher et se poursuivre.
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[1] Dans « L’école de la simplexité », chapitre « Piscine »
[2] Dans « L’école de la simplexité », chapitre « la piscine ».
[3] De récentes enquêtes ont montré qu’il y a bien plus d’illettrés mathématiques que d’illettrés littéraires… sauf qu’ils ne le savent pas et même qu’on ne le sait pas.
[4] Des visiteurs me faisaient souvent cette remarque en observant ce que faisaient des enfants : « Mais te rends-tu compte qu’ils sont dans des notions qu’on aborde seulement au lycée ou plus tard ? » Non, je ne le savais pas et les ignorais pour la plupart ! Qu’importe. Je savais par contre que leurs cerveaux bâtissaient des représentations, se forgeaient les outils qu’ils pourront ensuite utiliser s’ils en auront besoin ou le désir.
[5] Je fais régulièrement la liaison entre école et agriculture biologique. Comme pour l’école il y a des courants avec leurs précurseurs, leurs théoriciens, leurs partisans, leurs méthodes, leurs formations. Lemaire-Boucher (autrefois), la biodynamie, la permaculture, la culture sans labours, l’agriculture naturelle, l’agriculture organique… Lorsqu’on s’y lance, il est bon d’avoir connaissance de leur histoire, des principes sur lesquels ils se basent, des différentes façons dont ils les mettent en œuvre. Mais sur le terrain des champs ou du jardin, c’est lui qui va devenir votre maître.
J’avais lu un ouvrage d’une allemande, Gertrud Franck : la base de sa méthode était la culture préalable massive des épinards dans tout le jardin ! Je trouvais cela génial et m’y lançai. C’était effectivement génial et la première année fut une réussite, mes voisins paysans se demandaient quel était le fou qu’ils pensaient manger tous ces épinards ! Mais voilà : il fallait semer mes épinards soit à l’automne, soit au début du printemps. Mon jardin, très argileux et froid, m’a fait comprendre qu’il ne pouvait répondre à ma demande en faisant à tout coup lever des graines d’épinards au moment où il le fallait ! Mon jardin n’était pas celui de Gertrud ! Il a fallu que je trouve d’autres moyens qui n’étaient pas tous dans les livres !
[6] Dans certains villages isolés des Alpes et du Jura, au XVIIIème siècle pratiquement tous les habitants savaient lire parce que des colporteurs sachant lire s’y trouvaient coincés l’hiver !