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Le blog de Bernard Collot
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15 avril 2023

1940-2021 (205) - Épilogue - VII L'information, l'écrit et l'image

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Jusque dans les années 2000.

 

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Dans le Bugey (tome 1) je ne me souviens pas d’avoir vu mon père acheter et lire un journal. De temps en temps je voyais bien trainer un « Modes et travaux » où ma mère trouvait des modèles de patrons (schémas de découpes de tissus) pour confectionner des chemises. Dans ce que l’on pouvait voir afficher de temps en temps sur les murs, il n’y avait bien que les grandes affiches imagées de l’annonce du passage des cirques Bouglione ou Pinder dans la région. À Noël, il arrivait que j’aie un album des « Pieds Nickelés », pour ma sœur c’était « Les aventures de Bécassine », mais c’étaient bien les seules lectures d’images que l’on pouvait avoir sous les yeux, en dehors des images d’Épinal sur la guerre de 14-18 dans le grenier du grand-père. Dans ce grenier il y avait aussi des piles de « Confidence » et de « Nous deux » qu’achetaient mes tantes et que je lisais… en cachette.

  

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Il y avait quand même le gros poste radio à lampes qui trônait sur une commode, cela avait été le gros achat de mon père qui, jeune, s’était fabriqué un poste à galène. On ne pouvait entendre clairement que les informations de la radio officielle pendant l’occupation. Je ne me souviens pas non plus avoir entendu mon père commenter les infos, je pense quand même que le « Travail, famille, patrie » de Pétain a dû l’influencer.

À Chavanoz (tome 2) nous découvrions la télé en noir et blanc que la voisine italienne ou l’entrepreneur de maçonnerie, italien lui aussi, nous invitaient de temps en temps pour voir « La piste aux étoiles » ou un match de foot de la coupe du monde avec Kopa, Just Fontaine…et Pelé. De temps en temps mon père lisait le seul journal régional acheté au bureau de tabac, Le Progrès de Lyon. À la radio, il n’y avait que la station de l’État qui avait le monopole des ondes et de l’information qui était diffusée.

 

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Ce n’est que dans les années 50 qu’une autre radio publique est apparue, Paris inter. Mes parents l’écoutaient beaucoup plus le soir où il y avait le « Petit conservatoire » de Mireille (J’ai toujours en mémoire sa chanson : « Couché dans le foin avec le soleil pour témoin… » !), puis des stations contournèrent le monopole de l’État en émettant de l’étranger et dans les soirées pouvait s’écouter sur la toute nouvelle Europe n° 1 l’émission de Daniel Filipacchi et Franck Thénot « Pour ceux qui aiment le jazz » ; ma mère n’aimait pas trop cette musique de sauvages. À part les infos météo (qui n’avaient pas annoncé la vague de froid de février 1956 !) pas grand monde ne s’intéressaient vraiment aux informations, en tout cas pas mes parents.

Je ne me souviens pas d’avoir vu des murs couverts d’affiches publicitaires. À part dans les bandes dessinées comme Tintin, les images n’étaient que des illustrations coûteuses.

 

 

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Ce n’est que fin des années 1950 et surtout dans les années 1960 que les informations et les images ont pris de l’importance. À Lyon, lorsque j’étais à l’école normale d’instituteurs, je découvrais les premiers kiosques de journaux avec bien en vue Paris Match et son slogan « Le poids des mots, le choc des photos ». Il y avait les journaux de ce qui était désigné comme la presse parisienne,  Le Monde, un peu trop intello, ou l’Humanité ; c’était le Grand Ducasse (un peu comme le Grand Duduche !) dont le père était communiste qui nous faisait lire l’Huma. Les premiers postes à transistors apparaissaient, mais ils étaient encore chers et c’était Raton (de son vrai nom Robert Rivière !) dont la famille était riche qui nous faisait écouter la radio pendant l’étude. Cette fois, avec la guerre d’Algérie, la prise de pouvoir de De Gaule, nous écoutions vraiment les infos, toujours sur Europe n° 1 qui échappait au monopole en émettant depuis La Sarre.

 

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C’est vraiment à partir de 1968 que l’information et sa diffusion devenue plus accessible prirent une grande importance. Les transistors et Europe n° 1 ont eu un rôle pendant les événements de mai : les journalistes suivaient les manifestations, informant en direct les manifestants sur les positions et les mouvements de la police. Nous étions nombreux, l’oreille collée au poste, à suivre ce qui se passait loin de nos campagnes, parce qu’en regardant l’unique chaîne de la télé en noir et blanc que j’avais acquise, il ne fallait pas compter apprendre ce qui se passait vraiment. Cependant, il y avait des émissions d’informations comme « Cinq colonnes à la une » ou culturelles comme « Ouvrez les guillemets » suivie par « Apostrophes » de Bernard Pivot que nous suivions beaucoup. Je connaissais ce dernier parce que son frère, Jean-Charles, vigneron en Beaujolais, amenait ses enfants dans mon école et qu’il venait à notre concours de belote avec une pile de bouquins qu’il annotait pour son émission tout en tapant les cartes, puis qu’il offrait ensuite comme prix supplémentaires aux joueurs. « la littérature passe avant la morale » disait Bernard Pivot.

 

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La télé était cependant encore très pudibonde : une animatrice, Noëlle Noblecour, fut renvoyée parce qu’elle avait laissé voir ses genoux à l’écran, ce dont bien peu (dont moi qui avait regardé cette émission !) s’étaient aperçus. Il n’empêche, qu’en dehors des informations qui ne diffusaient pas forcément des mensonges, mais seulement les infos qui convenaient au Pouvoir, beaucoup de ces émissions auraient du mal à être diffusées aujourd’hui comme « Droit de réponse » de Michel Polac qui faisait scandale, mais que tout le monde ou presque regardait.

  

information6_1 En juillet 1969 j’étais resté pendant plus d’un jour les yeux rivés sur l’écran pour suivre en direct la fabuleuse aventure du premier pas d’un homme sur la lune (tome 4). C’est peut-être ce jour que l’image télévisée de manière insidieuse a commencé à être prise par beaucoup comme ne pouvant travestir la vérité. En tout cas, en dehors des soirées où nous recevions des amis, allions chez eux ou au cinéma ce qui était fréquent, nous regardions beaucoup la télé. Jusqu’en 1975… où je n’ai plus eu la télé (tome5) !

 

La presse écrite. Après 1960, mon père lisait régulièrement le quotidien régional, le Progrès de Lyon, mais rien d’autre. Les journaux régionaux étaient les plus lus, Ouest-France, Sud-Ouest ou le Télégramme, de Brest avaient beaucoup plus de lecteurs que la presse parisienne, mais les infos nationales étaient réduites à une ou deux pages. Dans le Beaujolais j’avais été correspondant local du Progrès de Lyon. Il y en avait dans presque chaque village. Bénévoles, nous étions indemnisés comme les pigistes au nombre de lignes diffusées. J’étais très fier lorsque je m’amusais à faire des reportages sur la fête des classes ou l’ouverture de la chasse et qu’ils étaient publiés avec les photos réalisées avec mon vieil appareil Semflex sur une demi-page. Cela a été mes premiers essais d’écriture !

 

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Mais c’est surtout après 1968 qu’a fleuri la presse parallèle ou alternative, illustrée par ses dessinateurs humoristiques et provocateurs, et que j’ai été en quelque sorte nourri par La Gueule ouverte, Hara-Kiri, L’idiot international, Tout,… L’écho des savanes, Fluide glacial, Métal hurlant… Libération, fondé par Jean-Paul Sartre, était peut-être le plus lu, il n’était pas ce qu’il est devenu aujourd’hui.

Au fur et à mesure du temps, des événements, nous étions de plus en plus assoiffés d’informations de toute sorte.

 

À L’école

Depuis 1920, la pédagogie Freinet puis les classes uniques de 3ème type ont eu comme un de leur pilier la communication et le droit des enfants à l’expression. Ceci avait d’ailleurs provoqué la première affaire Freinet en 1933 et sa démission de l’Éducation nationale. Le texte libre, les journaux scolaires ont une longue histoire que j’ai longuement narrée à plusieurs reprises. Nous nous étions également emparés de l’image. D’abord avec la photo : dans le Beaujolais j’avais installé un petit labo photo à côté de la classe, mais l’utilisation des photos comme moyen de communication était difficile. Cela avait été avec le super 8 que les enfants et moi-même avons appris à construire des films de trois minutes racontant ou expliquant quelque chose ainsi que comment on pouvait s’arranger pour que les images paraissent être vraies sans pour autant déformer la réalité. Mais pour les transmettre à d’autres classes fallait-il qu’elles aussi ou leurs instits aient un projecteur super 8, et les cassettes de film coûtaient cher.

 

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Dans ma classe unique et dans les années 1980 nous avons pu nous emparer de la vidéo. Cette fois, non seulement nous pouvions réutiliser la bande VHS autant que nous voulions ou l’envoyer à des correspondants et la faire circuler un peu comme la « télé brouette » du Plateau de Mille Vaches où une cassette produite par des professionnels pouvait voyager les informations et reportages de la région d’un village à l’autre. Nous avions même fait des échanges vidéocorrespondance avec une école des États-Unis et, ne connaissant pas leur langue, il fallait que les images parlent d’elles-mêmes.

 

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En ce qui concerne le son depuis les années 1945, beaucoup de classes Freinet avaient un magnétophone à bande, voire un autre à K7 sur lequel les montages effectués sur le magnétophone à bandes pouvaient être transposés et envoyés à des correspondants. Nous faisions ainsi un journal parlé envoyé à d’autres classes et sur lequel elles rajoutaient leurs propres informations, puis il revenait chez nous. Seules quelques classes ont eu l’occasion d’être invitées dans les radios libres des années 1980, mais celles-ci n’ont pas duré.

Que ce soit pour la réalisation et la transmission de l’écrit (journal scolaire et circuits de journaux scolaires), du son ou de l’image, nos enfants savaient comment tout cela se fabriquait puisqu’ils le faisaient, pouvaient réagir à ce qu’ils recevaient des émetteurs (interaction), étaient plus ou moins capables plus tard d’être critiques face à l’information et aux images qui se déversaient.   

Dans l’ensemble de l’école toujours restée traditionnelle, l’information n’était toujours que celle des manuels scolaires ! Le droit de s’informer, d’être informé, c’était pour l’âge adulte.

Aujourd’hui.

Je ne dirai pas que nous ne soyons pas toujours avides d’informations ou que celles-ci ne soient plus diffusées nulle part, mais elle est portée par bien d’autres supports et suit bien d’autres canaux, et, soit elles nous submergent, soit il nous faut aller les chercher ce que ne fait pas forcément la majorité de nos concitoyens.

L’amoindrissement de l’écrit. La grande presse écrite, celle qui a été rachetée par quelques milliardaires, est de moins en moins lue. Je n’achète plus Libé depuis quelques années. C’est le drame de beaucoup de journalistes, le temps d’Albert Londres, Émile Zola, Joseph Kessel et d’autres est bien loin. Seuls les journaux provinciaux ont encore leurs lecteurs. Même la presse alternative a du mal à trouver un public et il a fallu attendre la tuerie de Charlie-Hebdo pour que je le revoie dans le rayon presse du supermarché du coin. La presse politique n’est plus trop lue que par les militants. Les photographes de presse, de guerre, ceux en freelance (voilà que je me mets à utiliser un mot anglais !) ne trouvent plus un journal preneur de leurs photos. Une de mes relations qui était photographe de guerre passionné et qui a fait à une époque des photos lui étant achetées par les grands journaux a complètement abandonné le métier, ce d’autant que les photos qui dérangeaient ce qu’il fallait que l’opinion publique croie étaient immanquablement censurées. Il m’expliquait qu’il ne serait jamais allé en Ukraine parce que seuls les clichés qui confortaient les politiques des États occidentaux étaient admis. Des millions de photos sont tirées aujourd’hui par tout le monde avec les smartphones et quelques-unes circulent quand même dans les réseaux sociaux, surtout celles policiers dans les manifs, ce qui ennuie passablement les gouvernements. Mais tout le monde n’a pas le temps de s’informer ou de suivre les réseaux sociaux accusés de colporter les fameuses fake news.

Cependant nous sommes aussi dans le temps de la falsification de l’image, donc de la vérité. J’étais un passionné de photos et un admirateur des photographes humanistes comme Robert Doisneau, Willy Ronis, Henri Cartier-Bresson… et des grands reporters photographes comme Raymond Depardon ou Robert Capa. Leurs photos étaient bien leur vision particulière des hommes, de la rue, des événements, mais c’était bien une réalité, aucun doute n’était permis. Aujourd’hui, la technologie de l’image de synthèse avec laquelle sont faits des films entiers est telle qu’on ne peut plus faire confiance aux images qui peuvent entièrement être fabriquées par des applications, à tel point que même des professionnels ont du mal à découvrir la supercherie. Cela peut seulement être drôle et porter un sens lorsque c’est signalé, mais souvent c’est de la pure tromperie.

Le poids des mots, le choc des photos, le slogan de quelques magazines, c’est aujourd’hui la photo d’une femme politique en tenue sexy sur Playboy, qui lui existe toujours ! L’image de la femme sexy est d’ailleurs utilisée pour tout et n’importe quoi, vous ne verrez jamais une présentatrice d’un JT bien chair avec une verrue sur le nez !

Les médias mainstream (j’ai mis longtemps à mémoriser ce que voulait dire cet anglicisme, mais à force de l’entendre !) tout le monde sait aujourd’hui qu’ils sont aux mains d’une poignée de milliardaires, même les derniers qui restent publics (mais encore payés par nous) ne sont pas mieux puisque leur patron est l’État.

 

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Il n’y a que sur Arte (plutôt tard dans la nuit) ou sur France Inter en dehors des informations et surtout dans l’après-midi quand la majorité de la population est au boulot, qu’il reste encore des émissions où l’on apprend autre chose que ce qui est rabâché ailleurs. Je ne sais pas si elles vont durer encore longtemps depuis que Daniel Mermet avec « Là-bas si j’y suis » a été viré ; le plus fort c’est qu’il a été viré par le directeur de la station, Philippe Val, qui auparavant avait été directeur de Charlie Hebdo ! Comme quoi il faut pouvoir retourner sa veste dans le bon sens du vent si l’on veut réussir dans ces métiers. Heureusement que des médias et des chaînes de télévision numériques alternatives ont pu se réfugier sur internet, mais elles sont en but au problème de leur financement : sur le net, on ne consulte ou ne regarde que ce qui est gratuit.  

 

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Nous sommes au temps de l’écrit court, celui qui doit tout dire en une ou deux phrases, qui ne doit être lu qu’en moins d’une ou deux minutes sur un écran, même plus sur du papier. Parce qu’aujourd’hui c’est sur les réseaux sociaux que circule l’information sur tous les domaines. Mais, dans les fils d’actualité qui défilent, on ne s’arrête ou on ne clique que s’il y a une photo ou une vidéo (à condition qu’elle ne soit pas longue) présentée seulement par quelques mots. Si c’est un billet (faut dire un post !) avec un long texte, tu peux être sûr qu’il ne sera pas lu, c’est vrai que le format utilisé par Facebook par exemple est rébarbatif. Même si tu veux dire ou provoquer quelque chose, il faut que tes quelques mots soient transformés en une image sur un fond coloré criard. La numérisation de l’écrit a cependant un petit intérêt : tu peux aujourd’hui publier carrément un livre en .pdf, il ne coûte rien, s’envoie instantanément. Tu peux même te faire plaisir en réalisant tes propres livres sur papier, il suffit d'en faire le fichier, de l'envoyer à une des entreprises robotisées qui le fabriquent et tu n'as plus qu'à te les acheter.

L’écrit court a été aussi celui des jeunes sur les SMS. Que n’ai-je entendu de cris horrifiés sur leur incapacité à écrire en français ! Or cet écrit est carrément un autre langage, avec ses codes, sa syntaxe qui en font aussi une forme d’expression  différente. J’avais entendu les mêmes cris de lettrés à propos des pages des journaux télématiques que faisaient les enfants de nos classes en pédagogie Freinet sur les écrans minitels. Il avait fallu que je force une universitaire, prof de lettres, à regarder les pages que les enfants de ma classe réalisaient pour transcrire les longues lettres que leur envoyait un marin de la Calypso pour qu’elle convienne qu’ils avaient inventé un genre littéraire.

On peut parler d’un nouvel écrit. C’est avec l’écrit, comme avec la parole, que la pensée simultanément s’élabore, s’exprime et se communique par l’intermédiaire d’un support. Pendant des siècles l’écrit était uniquement constitué de mots. Or, aujourd’hui il peut intégrer en les combinant graphismes, images fixes, images animés, sons, musique. La pensée exprimée est ainsi beaucoup plus complexe à saisir, peut être interprétée différemment, parfois et a contrario paraître plus floue. Il est significatif que l’écrit classique le plus percutant est ce que les rappeurs appellent des punchlines.   

  

 

Le langage le plus utilisé pour raconter, expliquer, informer est aujourd’hui celui de la vidéo.

 

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Les jeunes sont ceux qui s’en sont le plus emparé et je suis toujours sidéré par l’expertise avec laquelle ils manipulent ce langage de l’image. Ils ne l’ont certainement pas appris à l’école ! Ils arrivent à créer de véritables petits bijoux de montage simplement installés dans leur chambre avec un ordinateur et ce qu’ils ont filmé avec un smartphone, le son qu’ils ont capté ou créé avec une application… Ils utilisent des plateformes où ne circulent que des vidéos où ils se connaissent, se reconnaissent, échangent… par l’image. Si tu chantes, composes, fais de la musique, tu ne seras pas connu ni écouté ni demandé si tu n’as pas ton site sur YouTube ! Les hommes politiques qui n’ont pas peur d’être ridicules se font inviter dans ces réseaux que l’on qualifie d’influenceurs.

 

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Pendant les Gilets jaunes puis dans les manifestations contre la réforme des retraites, ce sont bien les innombrables vidéos prises par les manifestants avec leurs smartphones et diffusées sur les réseaux sociaux qui ont révélé les violences policières et les stratégies des forces de l’ordre. Cela a aussi été pendant les gilets jaunes que certaines de leurs têtes d’affiche réalisaient à partir de chez eux, parfois de leur voiture, des selfies-vidéo où ils exprimaient leurs réflexions qui étaient très regardées sur leurs sites ou diffusées sur les réseaux sociaux.

 

La pub

Elle a bien évidemment utilisée l'image au maximum, ce d’autant que toutes les chaînes de télé, privées ou publiques, ne vivent plus que par elle et tout le monde est bien obligé de voir ce qui interrompt même les films. Au début il pouvait y avoir un intérêt. Par exemple les pubs de voiture expliquaient qu’il fallait acheter telle ou telle voiture parce qu’elle avait ce que n’avaient pas les autres, une suspension innovante, une nouvelle direction assistée, une robustesse prouvée dans des rallyes…

 

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Très vite cela a été des slogans pour le moins surréalistes. Coluche s’est régalé dans un sketch grinçant avec la lessive qui lave plus blanc que blanc avec ses enzymes gloutons. Il n’y a pratiquement plus aucune publicité qui t’explique quel intérêt a tel ou tel produit qu’il faut absolument que tu achètes. Pour poursuivre l’exemple des bagnoles, il faut dire qu’elles se ressemblent toutes, ont toutes les mêmes équipements. Les publicitaires pensent que c’est l’esthétique de la réalisation produite qui va te donner envie, la voiture dans des paysages idylliques, les femmes qui sont magnifiques dont tu ne sais qu’à la fin que c’est peut-être grâce au beau flacon de parfum qu’elles utilisent ou au pot de yaourt bien sûr biologique qu’elles dégustent à chaque repas. Biologique, écologique, alimentation saine, perfection des corps, santé parfaite… il faut maintenant que cela apparaisse dans tout et n’importe quoi.  C’est vrai que certaines de ces pubs sont cinématographiquement très réussies, tu peux même te demander pour quel objet à acheter elles ont bien pu être tournées. Comment les publicitaires peuvent-ils croire que les téléspectateurs sont assez stupides pour grâce à elles faire grimper les courbes des achats de telle ou telle marque ?

Nous sommes dans le siècle de l’image et de son instantanéité. L’appropriation par tous du langage de l’image a été surprenante. Le plus important a peut-être été l’inventivité avec laquelle les uns et les autres en ont multiplié les formes. Cela a aussi permis de contrecarrer le monopole de l’information par les pouvoirs. Cependant je crains qu’ainsi s’amenuise le temps du recul, de la réflexion, de la critique, de la concertation que seul permet le temps long. Le défaut de cette expression-communication est sa volatilité. Les paroles s’envolent, seuls les écrits restent... s’ils sont dans des livres !

 Prochain chapitre : Le temps, les horaires - chapitres précédents

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