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Le blog de Bernard Collot
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8 mai 2023

1940-2021 (216) - Épilogue - XVIII Le changement climatique

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C’est la grande affaire aujourd’hui. Mais, si les médias ne s’en étaient pas emparés, pour une fois à juste titre, nous en serions-nous vraiment rendu compte ? Parce que cela n’est pas arrivé du jour au lendemain. Il a fallu longtemps pour qu’on l’admette ainsi que l’espèce humaine dans sa société mondialisée y était probablement pour quelque chose.

En milieu rural où j’ai passé l’essentiel de ma vie, nous aurions dû être les plus à même de nous rendre compte d’un changement puisque, même si l’on n’était pas paysan (mais nous avions des jardins), le climat régentait plus ou moins la vie. Depuis toujours chaque année était différente, il y avait celles aux hivers plus rigoureux, par exemple février 1956, ou plus ou moins neigeux suivant aussi la région où j’habitais, par exemple dans le Poitou où la neige était moins fréquente, celles aux étés secs et chauds, par exemple l’été 1976, ou aux étés pourris, mais c’était dans l’ordre de la nature. Après la pluie, le beau temps, ou Noël aux balcons, Pâques aux tisons ou l’inverse étaient les dictons de l’almanach Vermot. Il n’y a pas d’abricots cette année ? On aura peut-être des cerises. Il n’y aura pas de cerises ? Ce seront peut-être des fraises ou des pommes.

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Les bulletins météo n’étaient pas ceux d’aujourd’hui (ils n’avaient pas vu venir l’hiver 1956), il fallait savoir lire les signes (rougeur du soir, espoir, rougeur du matin, chagrin ! - Les grues passent, laboureur à ta charrue…) et avoir un baromètre. Chaque saison était cependant bien marquée, qu’elles soient plus ou moins en avance ou en retard, plus ou moins belles ou pourries faisant les décalages entre les dates des récoltes d’une année à l’autre. Si une hirondelle ne faisait pas le printemps, à une ou deux semaines près elles arrivaient toujours.

Par contre ce que nous avons vu progressivement changer a été l’environnement. J’en ai déjà parlé à propos de l’agriculture ou de la bétonisation des villes. J’ai vu ainsi le Rhône, après la construction du barrage de Génissiat, complètement perdre son caractère de fleuve sauvage et ses lônes qui étaient inondées à la fonte des neiges. Tous les paysans avaient bien vu les terres beaucoup plus souffrir de la sècheresse et du balayage des vents après le remembrement et la disparition des haies dans les années 1960. Mais bon ! C’était le prix du progrès. De là à imaginer que c’était la planète entière qui allait basculer…  

Il est probable que les citadins se sont encore beaucoup moins rendu compte d’un changement, entre métro, boulot, dodo ils n’ont pas beaucoup de temps pour avoir le nez dehors et puis pendant longtemps une bonne majorité n’avait pas beaucoup de loisirs ni de moyens pour profiter des espaces verts s’il en restait encore ou d’aller se balader dans la campagne.

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Un déjeuner à la campagne ou au bord de l’eau, c’était possible, mais, dans les tableaux de peintres qui s’en sont régalé, c’est surtout la petite bourgeoisie qui y est peinte.

Lorsque j’allais dans les années 1960 en vacances dans la famille languedocienne (j’étais bien un privilégié !), le littoral, les plages, les marécages étaient tels qu’ils avaient toujours été, c’était la nature… avec ses moustiques (tome 3). Aujourd’hui c’est du béton, payant, mais il n’y a plus de moustiques et l’eau potable puisée dans les nappes pour les habitants commence à manquer. D’ailleurs ce n’est plus le soleil qui marque l’été mais l’arrivée des touristes.

 

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À partir des années 2000, c’est surtout l’avancée cette fois régulière et constante de la date des récoltes qui a été un signe palpable d’un réchauffement, en particulier la date des vendanges puisqu’elles mobilisaient et marquaient la vie des villages en régions viticoles. Lorsque j’étais en Beaujolais, le mois des vendanges c’était octobre. Lorsque je suis arrivé en Sancerrois, de façon peu sensible d’abord puis rapidement de façon très marquée, septembre est devenu le mois des vendanges, voire en 2023 fin août ce qui, de mémoire des vieux vignerons, n’était jamais arrivé. Mais cela n’a pas encore impacté la qualité et la quantité de ce qui était récolté, la sècheresse estivale a même diminué le nombre de traitements à faire, tout au moins en ce qui concerne la viticulture sancerroise parce qu’il n’en est plus de même pour les autres cultures, en particulier maraîchères. C’est bien ce dernier point qui a commencé à être la source d’une inquiétude plus que justifiée.

Lorsqu’en 1974 René Dumont annonçait entre autres les futures pénuries d’eau potable, ce n’était pas un changement climatique qu’il mettait en cause mais le pillage de l’environnement et de ses ressources. La destruction de l’environnement tout le monde aurait pu, s’il l’avait voulu, le constater.

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Il a fallu que les scientifiques, les statistiques des relevés météo, les constats sur les glaciers, la banquise… démontrent qu’effectivement il n’y avait plus aucun doute, depuis quelque temps déjà il y avait un réchauffement général de la planète. Nous pouvions quand même constater que des événements extrêmes étaient plus fréquents qu’autrefois comme les pluies cévenoles, les pics de chaleur, les étés secs… mais pas partout comme la tornade qui était remontée des Landes l’été 1970 jusqu’en Poitou ou l’orage diluvien qui avait envahi de boue ma vieille maison en Sancerrois en juillet 2004 qui n’avait eu de mémoire comme seul précédent qu’un été aussi de l’année 1970 mais qui ne s’est pas reproduit depuis. Bien sûr on savait que le climat avait beaucoup changé naturellement au cours des siècles ou des millénaires et des pseudo-scientifiques comme Claude Allègre, qui plus est ministre, prétendaient que nous n’y étions pour rien. Il a fallu du temps pour que tout le monde convienne que la société y était au moins pour quelque chose.

Paradoxalement, la sonnette d’alarme n’a pas été tirée par le monde rural mais plutôt par la frange écologiste intellectuelle et bourgeoise, pointant plutôt le monde agricole dans sa destruction d’un environnement dont elle pouvait moins profiter ou pointant le peuple roulant trop en bagnole. Il y a eu un inversement curieux des flux migratoires intérieurs : ce n’était plus l’exode rural vers les villes pour trouver du boulot mais l’exode urbain de ceux qui en avaient les moyens pour profiter de la campagne et fuir les nuisances des cités. Toutefois pour beaucoup, la résidence campagnarde était surtout un pied-à-terre qui n’empêchait pas de faire autant d’aller et retour vers les grandes métropoles pour les affaires qui continuaient à se dérouler là-bas. D’autres avec plus de moyens ont pu abandonner leur situation et y jouer les gentlemen-farmers. Une des conséquences a été la poursuite de la construction ou de la prolongation d’autoroutes pour raccourcir le temps de ces allers et retours.   Une autre a été que les autochtones vivant sur place ont eu de plus en plus de difficultés à trouver un logement abordable. Lorsque je suis arrivé en Sancerrois, l’autoroute A7 venait d’être terminée et nous avons eu le plus grand mal à trouver une vieille maison à réparer.

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On entend surtout parler de CO2, coupable de tout alors que sans lui pas de vie végétale, ainsi que des « gaz à effet de serre », ce qu’émettent aussi en masse les éruptions volcaniques… ou les vaches. Le principal étant donc, apparemment logiquement, d’en réduire les émissions. D’où la multitude de mesures visant surtout la population : taxation de l’énergie pétrolière, à terme imposition de changer de véhicules et rouler tout électrique, changer tous les appareils de chauffage, etc. Le transport en commun est préconisé, mais toute l’infrastructure ferroviaire qui quadrillait le pays de la fin du XIXème siècle à la première moitié du XXème a été abandonnée au profit justement de la voiture !

Lorsque l’agriculture industrielle et intensive est effectivement la première menacée par les sècheresses et l’épuisement des nappes phréatiques, pas question de revoir toutes les politiques agricoles alors que non seulement on sait comment une agriculture biologique est désormais possible mais qu’il y a aussi une demande. On crée des bassines qui ne font qu’empirer le problème et assèchent encore plus les petites exploitations aux pratiques et aux cultures respectueuses de leur environnement.  

Autrement dit, on s’évertue à aménager LE système, sans s’attaquer au système lui-même dont une minorité tient à continuer de profiter (j’y reviendrai). Les Gilets jaunes ont peut-être été le premier mouvement un peu massif et populaire à le remettre en cause sur les ronds-points et les assemblées citoyennes à partir de la simple provocation d’une taxe carbone relativement minime sur l’essence. Mai 68 et les Gilets jaunes ont été à mon avis les deux rendez-vous manqués des dernières décennies où nous aurions pu prendre une autre direction.

 

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Il n’est plus de personnes raisonnables qui n’admettent pas que la cause des causes est ce système du profit et de la finance s’alimentant de la consommation et de la production à outrance ainsi que des inégalités qui le permettent. Il n’y aurait pas que la théorie de la décroissance pour engager un renversement mais rien que d’imaginer sa possibilité fait frémir tous les pouvoirs. Et la peur de « Ce serait revenir à la lampe à pétrole ! » est brandie par le président Macron lui-même. Personne n’a évidemment envie de revenir à l’homme des cavernes, même à la lampe à pétrole que personne n’a connue à part les vieux comme moi, mais cela suffit à faire son effet comme si la décroissance c’était cela. Soit ces gens qui nous dirigent sont stupides et aveugles, soit ils pensent que nous le sommes pour gober leurs fadaises, les deux s’avèrent malheureusement un peu vrai.

Alors pas d’illusions, nous sommes bien incapables d’arrêter l’évolution d’un climat. Mais celle-ci est peut-être notre chance : elle ne détruira pas la vie sur la planète, mais immanquablement c’est le système de notre société maintenant mondialisée qui se détruira puisque par son fondement même il ne peut pas s’adapter. Darwin nous l’expliquerait !

Prochain chapitre : l'école - chapitres précédents

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