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Le blog de Bernard Collot
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7 mars 2007

Leçon de vocabulaire et interdiction de parler !

Un ministre, De Robien, persuadé qu’il sauve l’école. Un linguiste, Bentolila, qui croit que, parce qu’il connaît les mécanismes de la langue (on peut supposer qu’il les connaît), il sait comment un enfant l’apprend. Et cela donne la dernière trouvaille en date :

Comme le vocabulaire d’une partie des enfants est insuffisamment riche pour qu’ils apprennent facilement à lire (ce qui n’est pas faux), instaurons des « leçons de mots » dès la maternelle. De là à ce que, sur la lancée, les parents ne soient pas incités fermement à faire une heure de « leçon de mots » dès le premier âge, il n’y a pas loin. Ce qui est devenu plus que des menaces, de la suppression des allocations à l’obligation de participer à des « écoles de parents », figure dans les programmes électoraux de ce qu’on appelle « grands candidats » sans que cela soit même de la dérision ! C’est à se demander, messieurs De Robien et Bentolila, comment des milliards d’enfants ont pu parler sur cette fichue planète, sans « leçons de mots ». Toute personne sensée peut même être amenée à penser que c’est justement parce qu’ils n’ont pas eu de « leçons de mots » mais qu’on leur a parlé et qu’ils ont pu parler… qu’ils parlent !

Parce que, expliquez-moi messieurs les ministres et savants, comment on peut penser améliorer le vocabulaire d’enfants qui en ont besoin quand l’essentiel de vos instructions (ordres), recommandations, consiste à empêcher les enfants de parler en classe hors de l’interrogation ou de l’injonction du maître ? Quand le retour en arrière que vous prônez en faisant semblant de ne pas le faire, consiste à empêcher la vie d’entrer dans l’école, la vie qui seule incite un enfant, et même un adulte, à parler… donc à aussi rectifier et enrichir le vocabulaire qui sert avant tout… à parler ? Vous faites, Monsieur De Robien, comme un de vos éminents collègues, ministre qui déclare un jour que « un policier n’est pas fait pour discuter avec les jeunes mais pour les arrêter quand ils sont délinquants »… et qui 5 ans plus tard devant les faits qui empirent, est obligé de ré-envisager l’instauration de ce qu’il a supprimé, des policiers qui parlent normalement avec les gens dont ils sont proches parce qu'ils doivent assurer leur sécurité, ce qui s'appelle aussi de l'aide[1].

Et puis, Messieurs les donneurs de leçons de pédagogie, vous rendez-vous compte qu’ainsi vous êtes en train de réhabiliter une partie de la « méthode globale » ? Le linguiste n’a pas du dire à son complice ministre que, s’il était nécessaire de connaître par avance les mots que l’on doit déchiffrer, c’est parce que cela va servir en partie à… les deviner ! Si on ne les connaît pas on ne peut ni les déchiffrer, ni leur donner du sens dans un contexte que l’on ne doit pas, paraît-il, avoir visualisé… globalement ! Et oui Monsieur le Ministre qui disiez il y a quelques semaines du haut de votre estrade ministérielle que lire n’est pas deviner ! Et oui, lire et apprendre à lire, ce n’est pas un truc qui se fait en 2O leçons, clef en main.

Mais il est quand même étonnant que des personnages comme Bentolila puissent penser que, parce qu’un mécanicien connaît parfaitement le fonctionnement d’une voiture, il ait aussi les compétences pour apprendre à conduire à d’autres, pire pour savoir comment on doit faire pour apprendre à conduire à d’autres. Même Noam Chomsky ne s’y est pas aventuré !



[1] A la même époque avait été supprimés ce que précédemment on appelait la police de proximité.

 

 

 

 

Commentaires
I
je viens de comprendre comment les leçons de mots s'articulent avec la méthode syllabique : d'abord le mécanisme du déchiffrement, puis l'accès au mot pour l'enfant et donc, émerveillé, au sens(dixit le ministre) et enfin le Maître lui distille chaque jour une once de sa Connaissance : un Mot ;ça a vraiment un côté cérémonie rituelle, en fait robien réforme la liturgie du C.P.
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B
Je suis tout à fait d'accord avec toi sur le mécaniste non seulement de la réponse de Bentolila mais de toutes les réponses apportées par tous ceux qui ont un pouvoir ou s'octroient un pouvoir à tous les problèmes qui sont posés par les systèmes que l'on pense comme seuls possibles ou logiques. Que ce soit dans le domaine de l'éducation ou tous les autres domaines. Le fameux bon sens dont on n'est capable d'apprécier que la seule "bonne" direction imposée par la seule logique dans laquelle on baigne. Un sens n'ayant de "bon" sens que dans la perturbation qui le porte.<br /> Je sais bien qu'envisager ainsi ce qui n'est plus alors qu'un mécanisme, c'est paraître dédouaner les De Robien mais aussi tous les autres, qu'ils s'appellent Jospin, Bayrou, Royal (1) ou autres Boutonnet, de toute responsabilité. Il me semble que ce qu'il faut surtout dénoncer c'est leur incompétence, mais il faut aussi dénoncer ce qu'on appelle "opinion publique" qui leur attribue des compétences ! Il y a un cercle dans lequel tout le monde est enfermé : le génie d'une révolution sera de sortir de ce cercle et non pas d'imploser dans la cercle.<br /> <br /> (1) je ne mets pas Sarko parce que je le place lui dans la catégorie des malveillants qui accentuent volontairement et en toute connaissance de cause un système dont il bénéficie.
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L
Je reviens sur ton excellent article<br /> <br /> Parce que je mesure mieux avec le recul ce qu'il y a de mécaniste dans la réponse<br /> <br /> Je pense que le pauvre bentolila est totalement instrumentalisé<br /> interrogé sur des sujets qui ne sont pas de sa compétence<br /> alors même que c'est un homme plein de bon sens et de réserve<br /> il en vient à soutenir des positions qui à terme montreront leurs béances.
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L
Oui<br /> je souscris à ton analyse pour les conclusions<br /> <br /> c'est terrible ce type de réponse fonctionnelle<br /> <br /> Le triomphe de la science des bureaucrate
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