Les intentions du président de la République d’empêcher l’instruction en famille, d’obliger tous les enfants à être scolarisé dès 3 ans et de rendre encore plus conformes les écoles alternatives devraient, a contrario, poser LE vrai problème.
Bien sûr que le problème ce ne sont pas l’IEF et les écoles alternatives mais bien l’école publique.
En elle-même l’école publique n’est pas à rejeter et devrait bien être un espace de rencontres des enfants avec d’autres enfants, d’autres adultes, d’autres environnements, d’autres découvertes, d’autres explorations cognitives, d’autres organisations sociales, de la poursuite de la construction de la socialité, du vivre ensemble.
- Encore faudrait-il que soit abordée sa finalité par l’ensemble des citoyens puisqu’elle concerne leurs enfants. Cela n’a jamais été fait. Ceux qui l’ont créée (Guizot, Jules Ferry) puis dirigée l’ont fait pour répondre aux besoins des États successifs, de l’ère industrielle puis de l’économie de marché et ne s’en sont jamais caché. L’école et le système éducatif sont d’ailleurs à peu près identiques à ce qu’ils étaient à l’origine.
- Encore faudrait-il qu’elle[1] puisse répondre aux besoins vitaux des enfants, besoins physiques, psychologiques, affectifs et ne pas à l’inverse les contrecarrer.
- Encore faudrait-il qu’elle puisse dès l’enfance faire vivre le premier mot de ce qui est écrit au fronton de la République : liberté. Ce mot n’a jamais été prononcé par aucun de ses fondateurs, leurs successeurs et ceux qui devraient être élus pour le faire respecter. Il est curieux que l’école « de la République » ne fasse pas vivre ce mot (pas plus que celui de démocratie) par les enfants qu’elle veut éduquer républicainement.
- Encore faudrait-il qu’elle comprenne que l’égalité qu’elle prône n’est que celle de l’uniformité et de la standardisation d’enfants transformés en élèves.
- Encore faudrait-il qu’elle comprenne que contraindre des enfants à des horaires et des rythmes qui ne sont pas les leurs, à l’immobilité ou à la mobilité contrôlée à longueur de journées, à l’empêchement de toute initiative, à l’exécution de tâches n’ayant aucun sens immédiat, à l’écoute d’une seule personne et à la restriction de l’expression et de l’interrelation spontanée avec d’autres enfants, est contraire au développement et à l’épanouissement de tout être social.
- Encore faudrait-il qu’elle comprenne que confiner des enfants en nombre dans des espaces clos est contraire à toutes les lois naturelles du développement et de l’épanouissement physique, mental et psychique.
- Encore faudrait-il qu’elle admette que tous les enfants sont différents et qu’il est impossible de les « conduire » comme on conduit un troupeau ou comme on conduit un élevage en batterie, quelles que soient les « méthodes » utilisées et appliquées uniformément.
- Encore faudrait-il qu’elle comprenne que l’on n’arrache pas un enfant dès trois ans à sa famille sans conséquences affectives, psychologiques et cognitives (obligation).
-Encore faudrait-il qu’un ministre de l’EN, son administration et tous les enseignants aient l’humilité d’accepter qu’ils n’ont aucune certitude de comment un enfant apprend, de ce qu’il doit apprendre, de quand il peut l’apprendre.
- Encore faudrait-il qu’elle admette que les apprentissages qu’elle pense être la seule à pouvoir faire réaliser s’effectuent en réalité dans toutes les interactions et interrelations dans les environnements physiques et sociaux des enfants. En leur prenant l’essentiel de leur temps de construction en adultes autonomes et sociaux (de 3 à 16 ans, de 8H à 18H), en les enfermant dans son seul espace, elle empêche justement TOUS les enfants de développer toutes leurs potentialités.
- Encore faudrait-il qu'elle admette que trier des enfants par âges, les faire passer dans des maillons successifs (classes) pour que des opérateurs (enseignants) greffent ce qu'un programme découpé dans le temps et par matières leur a dit de greffer (enseigner) en contrôlant artificiellement que les greffes (savoirs) ont bien pris, c'est le même processus qu'une chaine industrielle qui traite des objets devant être standardisés pour une production de masse.
- Encore faudrait-il que depuis Montaigne, « l’enfant n’est pas un vase qu’on remplit », elle ait compris ce que même les récentes sciences neurobiologiques, neurocognitives, psychologiques… disent.
- Encore faudrait-il qu’elle admette que l’IEF et en particulier le unschooling ainsi que les écoles alternatives sont les laboratoires qu’elle ne peut ou ne veut être à observer et qu’elle pourrait tirer des enseignements de ce qui s’y démontre.
- Encore faudrait-il qu’elle admette que les parents biologiquement responsables de la survie et du devenir de leurs progéniture ne peuvent être déresponsabilisés quotidiennement et tenus à l’écart de ce que l’État décide et fait de leurs enfants, quand en même temps ils sont tenus responsables et justiciables de leur non-conformité ou de leur insoumission à ce qui est devenu leur « mère éducative ».
- Encore faudrait-il qu’elle puisse offrir une liberté de choix aux familles et aux enfants parmi les diverses conceptions reconnues des apprentissages et de la socialisation (pédagogies), la liberté pédagogique n’étant reconnue qu’aux enseignants… et elle est très relative dans le cadre des instructions leur disant ce qu’ils doivent faire !
- Encore faudrait-il qu’elle favorise les pédagogies (qui ne sont pas des « méthodes ») pourtant reconnues universellement comme la pédagogie Freinet et n’empêche pas des enseignants de les appliquer pleinement ou les restreint parce que ne rentrant pas dans la logique et la finalité actuelle du système éducatif [2].
- Encore faudrait-il qu’elle ne jauge pas sa propre réussite par les réussites chiffrées à ses contrôles ou par l’obtention de diplômes. Faudrait-il qu’elle ne condamne pas les enfants à courir à longueur de temps après des notes, des satisfécits jusqu’à ne plus être autre chose que ce que des appréciations ou des chiffres disent d’eux, qu’elle ne les condamne pas à n’avoir plus qu’à éviter des sanctions ou obtenir des récompenses.
- Encore faudrait-il qu’elle comprenne que c’est elle qui fait fuir familles et enfants et même des enseignants.
- Encore faudrait-il qu’elle comprenne que si elle est bien la matrice de notre société, ce sont bien ceux formés par elle-même, telle elle a été et est toujours, qui sont incapables d’empêcher le désastre social, sociétal comme environnemental que tout le monde subit.
[1] « elle » : l’école publique. J’aurais pu employer « il », le président, « il » le ministre de l’EN, « ils » les élus, « ils » président, ministre, élus, administration, enseignants. Mais « elle », l’école publique, c’est tout cela.
[2] Les enseignants qui veulent pratiquer la pédagogie Freinet sont obligés de se co-former pendant leurs vacances avec les militants des groupes départementaux Freinet, en autogestion et à leurs frais. Ceux qui veulent se former à la méthode Montessori doivent l’être par les formateurs de l’association Montessori-France, pendant leurs vacances et cette formation est payante.