Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Bernard Collot
Le blog de Bernard Collot
Derniers commentaires
24 juin 2023

Arrêter ou ralentir le changement climatique ?

collapsologie-effondrement

Un leurre !

 Voilà que cela préoccupe toutes les instances. Enfin, dira-t-on ! C’est aussi parce que tous les dominants sentent bien qu’eux aussi vont en pâtir. Le sentiment que notre espèce y est probablement pour quelque chose a mis quelque temps à émerger. Mais imaginer que notre espèce va avoir quelque pouvoir pour enrayer ce qu’elle a contribué à déclencher, voire même à prévoir ce qui va se passer, c’est s’arroger un pouvoir divin !

Tout est système. L’univers, la planète, chaque être vivant (cellule, microbe, plante, animal, nous), chaque groupe d’êtres vivants, chaque espèce. Tous ces systèmes sont interdépendants les uns les autres. C’est à mon sens la plus grande avancée des sciences biologiques ou sciences de la vie de ces dernières dizaines d’années qui a donné naissance à l’écologie. Le fait que nous, l’espèce humaine, ne sommes rien de plus que le moindre microbe, la moindre plantule, le moindre insecte a beaucoup de mal à être accepté.

J’ai évoqué à de très nombreuses reprises la théorie des systèmes vivants, de leur structure dissipative leur permettant d’évoluer, de s’adapter suivant les perturbations perçues de leur environnement ou d’eux-mêmes, tout simplement parce qu’elle éclairait, voire expliquait, ce qui se passait dans ma classe unique du 3ème type (un système vivant composé d’autres systèmes vivants, le tout comme chacun évoluant). Nous appartenons et dépendons du système de l’espèce humaine, système lui-même ayant été d’abord divisé en plusieurs systèmes (sociétés) suivant les environnements où ils devaient vivre et perdurer.

Chaque espèce s’est constituée en système vivant, un système différent suivant chacune. Système plus individualiste pour les unes (exemple les chats ne dépendent d’aucun autre chat), plus grégaires pour les autres (avec un dominant ou une dominante devant assurer la protection ou la procréation d’un groupe de ses congénères), plus sociaux pour d’autres (sans dominants) ou pouvant modifier l’environnement proche de leur habitat (par exemple les castors). Ce qui me frappe dans tous ces systèmes, ce n’est qu’aucun de leurs membres n’occupe une position plus favorable ou confortable que les autres. On peut remarquer aussi que toutes les espèces pratiquent le contrôle de leur population, soit de façon naturelle, soit de façon qui semble résulter de décision collective comme chez les abeilles (essaimage, contrôle de la ponte de la reine qui n’est que la pondeuse créée et sélectionnée par la colonie).

Comme tout système vivant, chaque espèce a évolué au cours des âges, l’échelle du temps s’étalant sur un temps qui n’est pas celui de notre temps historique. L’évolution, l’adaptation puis la disparition, parfois la résurgence sous une autre forme, ce qu'a développé Darwin. La disparition de la plupart des dinosaures m’avait frappé et intéressé comme beaucoup. De nombreuses raisons ont été évoquées dont d’ailleurs le climat, mais quelques-uns d’entre eux ont survécu et perduré en se transformant (comme les oiseaux). Or ceux qui n’ont pas survécu sont ceux qui profitant de l’abondance avaient atteint des tailles imposantes.

Très intéressantes aussi les dernières études qui semblent démontrer que c’est la séparation physique dans deux environnements différents du même groupe de primates qui a provoqué deux types de comportements et de relations sociales complètement différentes, les gorilles et les bonobos.

Or, j’avais lu il y a longtemps deux études, l’une d’archéoanthropologues, l’autre de chercheurs dans l’histoire des sociétés. La première, en étudiant les traces des groupes supposés humanoïdes dans les strates géologiques, avait découvert qu’au fur et à mesure que l’on passait d’une couche aux couches supérieures, la taille des groupes que révélaient leurs traces augmentait, puis ils disparaissaient pour réapparaitre dans une couche suivante avec une taille plus réduite pour recommencer à croître… et disparaître à nouveau. La seconde, en utilisant des outils informatiques performants, avait constaté que toutes les sociétés pourtant au moins aussi sophistiquées que la nôtre (exemple : civilisation inca, civilisation égyptienne…) avaient disparu lorsqu’elles s’étendaient et surtout lorsque peu à peu seule une minorité accaparait et profitait de l’abondance créée. Dans le même ordre d’idées, les microsociétés dites primitives qui ont perduré jusqu’à ce qu’on les détruise et qu’ont pu encore étudier des anthropologues comme Lévi-Strauss ont traversé, elles, des millénaires.

Le profane que je suis peut se dire que n’importe quelle espèce qui dans son auto-organisation n’a pas pu s’adapter ou changer de voie lorsqu’elle a constaté qu’elle faisait fausse route se condamne irrémédiablement.

Notre propre société, donc le système que nous constituons, ne date pas d’aujourd’hui. Il me semble que les historiens et anthropologues s’accordent pour la dater du moment où notre espèce est devenue sédentaire. À l’échelle du temps, cette époque que l’on se plait à qualifier de civilisée n’est pas grand-chose. Cependant il me semble qu’on y retrouve tous les ingrédients qui ont abouti à la disparition d’autres espèces et à d’autres civilisations que celle actuelle : extension des groupes, dominations s’établissant au profit des dominants, multitudes de structures sociales dissipatives ouvertes (qui pouvaient évoluer) devenant des structures fermées (États) se substituant de par les conquêtes à celles des groupes annexés (découpages artificiels des territoires des peuples autochtones), toutes les microstructures de survie, agricoles, économiques et autres devenant des macrostructures… jusqu’au terme final d’aujourd’hui : la mondialisation. C’est aussi ce que nous pensons être la force de notre espèce dans l’utilisation d’outils et notre capacité d’invention de technologies qui, si elle nous a permis d’améliorer notre sort et de faciliter notre vie et notre survie, a aussi permis l’extension d’un seul type de société à la planète entière.

Il y a un autre phénomène que la systémique a mis au jour : tous les systèmes, mais encore beaucoup plus les systèmes fermés que les systèmes ouverts (systèmes vivants), sont soumis à l’entropie. C’est-à-dire que, quels que soient les moyens mis en œuvre pour assurer le maintien de sa structure et les positions de chacun de ses éléments en leurs états originels, leur ordre intérieur se détériore inexorablement. L’entropie et simultanément son phénomène inverse, la néguentropie, c’est-à-dire l’accentuation de l’ordre, s’accentuent et s’accélèrent selon une progression géométrique où, comme dans l’équation du nénuphar d’Albert Jacquard, dans sa phase finale le système disparaît. Il semble bien que notre espèce soit dans cette dernière phase. L’histoire qui se focalise sur les conquêtes en vantant leurs héros et leurs bienfaits (exemple les colonisations) est particulièrement aveugle. Elle explique beaucoup moins comment ont été avortées et vite vidées de leur sens par le système lui-même les révolutions qui étaient les soubresauts pour justement y échapper. Elle nous raconte l’ère de l’industrialisation comme ce dont nous pensons avoir profité alors qu’elle a été le début de l’accélération du processus.

Le hasard de ma date de naissance m’a fait traverser cette phase d’une accélération finale (les dix tomes de ma rétrospective).

Autrement dit, ce n’est pas le réchauffement climatique qui nous menace, mais le système sociétal global dans lequel nous sommes enfermés, on peut dire dans lequel nos dominants nous tiennent enfermés ou que nous acceptons d’y être enfermés.

Il n’y a pas besoin d’être un analyste expert pour constater que le grand tralala actuel autour des concertations actuelles des dirigeants voulant ou disant qu’ils veulent réduire les effets des modifications climatiques en cours ne touche en rien le système mondial englobant tous les autres systèmes politiques, économiques, agricoles, industriels, financiers, éducatifs… Ils cherchent seulement comment ils peuvent justement empêcher ledit système de s’écrouler en en bricolant quelques pans.

Donc, aucun doute, le système s’écroulera sous très peu, le climat ne lui donnant qu’un petit coup de pouce.

 Est-ce à dire que l’humanité est entièrement aveugle, que nos enfants n’ont plus aucun espoir de survivre ?

Je ne crois pas. De tout temps et partout il y a eu des éclairs de lucidité, des tentatives d’échapper à un sort programmé par d’autres et pas seulement sous l’influence de philosophes humanistes et éclairés. Mais in fine ce ne sont pas ces derniers qui ont eu un vrai pouvoir de transformation, ne serait-ce que parce que leurs paroles étaient circonscrites à des cercles supérieurs qui n’en avaient pas grand-chose à faire si cela risquait d’aller à l’encontre de leurs intérêts. C’est bien instinctivement que surtout les plus opprimés et défavorisés ont perçu d’où leur venaient leurs malheurs.

Actuellement, avec les ZAD et toutes les microtentatives alternatives qui se multiplient, je citerai particulièrement le mouvement des Gilets jaunes. Très vite, sur leurs ronds-points, dans leurs assemblées citoyennes, non seulement ce sont bien tous les systèmes (malheureusement sauf le système éducatif !) qu’ils ont remis en cause, mais ils ont élaboré et tenté de commencer entre eux d’autres façons de survivre et vivre ensemble. Même la lutte contre la réforme des retraites a remis en cause ce qu’il faut bien appeler l’esclavage du travail qui a de moins en moins le sens d’une utilité sociale. Or, comme le prévoit la phase finale de la théorie des systèmes, la répression, c’est-à-dire la néguentropie pour maintenir un ordre initial, est devenue de plus en plus féroce, contre eux et toutes les tentatives alternatives radicales. Toute l’actualité médiatique est bien obligée de faire état de cette répression même si elle l’attribue à la nécessité d’empêcher ce que certains bien-pensants appellent une « décivilisation».

Si j’en crois Darwin et la théorie des systèmes, ce sont bien tous les gros et puissants qui vont disparaître avec leur système, d’où leur remue-ménage actuel ! Tenez bon les alternatifs, vous êtes l’essence de la nouvelle espèce humaine ! Vive le changement climatique !

Chronique suivante : L'ordre, c'est quoi ?

Commentaires
B
j'ai eu aussi comme lui la même passion pour les Gilets jaunes !
Répondre
B
Merci pour ces deux liens (et aussi pour avoir la patience de me lire !). J'ai la même exaspération qu'un Jacques Deschamps (que je ne connaissais pas). Mais ce n'est pas philosophiquement qu'elle est advenue, c'est dans le long parcours sur place dans la traversée et la transformation de notre époque. C'est ce parcours depuis les années 40 qui m'a fait entreprendre sa modeste rétrospective, mais je ne savais pas trop ou tout au moins pas de façon précise qu'il allait illustrer ce que à quoi des siècles d'aveuglement allait aboutir.
Répondre
A
Oui, merci ! Tout à fait d'accord. <br /> <br /> Cela me donne envie de partager deux pistes pour poursuivre la réflexion : <br /> <br /> 1. Jacques Deschamps, l'éloge de l'émeute : https://www.youtube.com/watch?v=mtX3EkznOl0 <br /> <br /> 2. Heide Goetner Abendroth Les sociétés matriarcales : https://www.desfemmes.fr/essai/les-societes-matriarcales/ <br /> <br /> Tout de bon !! Anne K
Répondre